Aujourd’hui, on ne parle plus de la Françafrique, excepté quelques retardataires de l’histoire, mais de la Chinafrique pour désigner la présence chinoise, devenue hégémonique, sur le continent africain.
Les Chinois parlent d’un rapport « gagnant-gagnant ». Leur stratégie passe désormais par le développement le « soft power » autour de deux axes majeurs : la formation initiale et continue (de plus en plus d’Africains partent étudier en Chine et, sur place, les Chinois multiplient l’ouverture des Centres Confucius) ; la mainmise sur un secteur stratégique, la télévision. Les Chinois ont pu d’abord bénéficier, en Afrique, d’un préjugé favorable fondé sur une présence ancienne, une absence de passé colonial, leur participation aux mouvements de lutte contre la colonisation, l’effet contrepoids à l’influence occidentale et leur capacité à investir massivement sans s’occuper de politique.
Aujourd’hui, le regard que portent les africains sur la Chine est plus nuancé, voire méfiant. Les observateurs parlent en effet d’une recolonisation de l’Afrique par la Chine, recolonisation qui se traduit par l’appropriation des richesses du sous-sol africain (minerais, pétrole) et du sol (foncier, produits agricoles).
Si les Chinois ont investi (1) dans les infrastructures, c’est pour disposer des routes qui permettent d’acheminer tous les produits primaires vers les ports où les attendent des containers en partance pour la Chine. Les investissements chinois dans une industrie locale de transformation, afin de créer de la plus-value et des emplois, sont rares. Aujourd’hui, la Chine retarde l’industrialisation de l’Afrique, comme autrefois le colonisateur.
Si les Chinois ont investi (1) dans les infrastructures, c’est pour disposer des routes qui permettent d’acheminer tous les produits primaires vers les ports où les attendent des containers en partance pour la Chine. Les investissements chinois dans une industrie locale de transformation, afin de créer de la plus-value et des emplois, sont rares. Aujourd’hui, la Chine retarde l’industrialisation de l’Afrique, comme autrefois le colonisateur.
Tout aussi dangereuse, mais invisible, car silencieuse, la mainmise de la Chine sur un secteur stratégique comme la télévision (passage à la TNT, bouquets de chaînes satellitaires) : l’offre chinoise, intéressante en apparence, conduit à un abandon de leur souveraineté culturelle par les pays africains. Incapables d’assumer leurs fonctions régaliennes, de nombreux Etats africains laissent le champ libre à la puissance financière de la Chine y compris dans le domaine culturel. Croyant diversifier ses partenaires et bénéficier de l’apport en capitaux et en technologies à travers un partenariat avec la Chine, l’Afrique perd des parts de souveraineté et prend du retard dans son industrialisation, dès l’instant que ne se développe pas un tissu productif local.
Les africains ne doivent pas être dupes d’une rhétorique chinoise, fondée sur le « gagnant-gagnant ». Il faut regarder de près les partenariats signés avec les entreprises chinoises, qui sont toutes sous le contrôle de l’Etat et du parti communiste, y compris les entreprises privées.
L’Afrique représente, pour la Chine, un enjeu géoéconomique qui lui permet de sécuriser son approvisionnement en ressources naturelles et en produits agro-alimentaires. Mais, l’Afrique représente aussi un enjeu géopolitique, puisque le continent africain permet à la Chine d’accroître son influence dans le monde.
L’Afrique a-t-elle la capacité de bien choisir ses partenaires ? C’est au tamis de la Chinafrique que peut se mesurer cette capacité.
L’Afrique a-t-elle la capacité de bien choisir ses partenaires ? C’est au tamis de la Chinafrique que peut se mesurer cette capacité.
Christian Gambotti
Directeur général de l’Institut Choiseul
Directeur général de l’Institut Choiseul
(1) En 24 ans, de 1990 à 2014, les relations commerciales entre la Chine et l’Afrique sont passées de 1 milliard de dollars (1990) à 240 milliards (2014). Une telle manne financière a dopé la croissance africaine, c’est évident. Mais, avec quels effets pervers ? La Chine dispose d’une puissance financière et industrielle, d’une stratégie commerciale et d’une discipline dans le travail qui retardent l’industrialisation de l’Afrique, même si, timidement, des entreprises chinoises (chaussures) délocalisent leur production en Afrique.
Article publié avec la collaboration de politikafrique.info
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