CHINE AFRIQUE

POUR DES RELATIONS RESPECTUEUSES, AMICALES, FRANCHES ET FRATERNELLES

mardi 25 juin 2013

Endiguement euro américain de la Chine en Afrique et guerre psychologique. – En point de Mire – Actualité et Flashback

Endiguement euro américain de la Chine en Afrique et guerre psychologique. – En point de Mire – Actualité et Flashback

Chine/Afrique 2/4: Endiguement euro américain de la Chine en Afrique et guerre psychologique.

L’endiguement

Paris – Grand vainqueur de la Guerre froide, le lièvre américain va alors bénéficier d’un état de grâce exceptionnel dans l’histoire des relations internationales contemporaines, à la faveur de l’implosion du bloc soviétique, une décennie prodigieuse d’unilatéralisme à l’effet d’accélérer sa mainmise sur les zones rétives à son Hégémon, au point que des laudateurs intéressés en viendront à voir dans le XXI me siècle «Le siècle américain» pour célébrer «Le destin manifeste» des Etats Unis.
Certes la guerre du Golfe en 1990-1991 a permis aux Américains de prendre pied au cœur des principaux gisements pétroliers de la planète, la guerre du Kosovo en 1999 de s’implanter au cœur de l’Europe centrale, particulièrement en Albanie, longtemps considérée comme un bastion de l’orthodoxie communiste.
Certes aussi, dans le droit fil de leurs objectifs, la guerre d’Afghanistan (2001), puis la guerre d’Irak (2003) devaient leur permettre de parachever leur mission en prenant pied, pour la première fois de leur histoire, dans le Caucase, plaçant l’Amérique au cœur du dispositif énergétique mondial par sa mainmise sur le Golfe et son contrôle des voies de ravitaillement du brut transcaucasien.
Sauf que le schéma parfait a souffert de fortes turbulences, dénaturant le projet initial. La guerre du Vietnam (1960-1975-52.000 morts), se superposant aux couts des deux premiers conflits majeurs du XXI me siècle (Afghanistan-Irak), de l’ordre de trois mille milliards de dollars (3 trillions), à la crise du système bancaire, une perte de capitalisation boursière de l’ordre de 25.000 milliards de dollars, enfin à la crise de l’endettement européen, ont considérablement réduit la marge de manœuvre du duo atlantiste, saigné son économie atlantiste et réduit la capacité de projection de la puissance américaine. La première puissance militaire de tous les temps a ainsi emprunté, sans y prendre garde, un schéma similaire à celui de l’Europe au XX me siècle.
Face à ce premier conflit majeur du XXI me siècle, l’Europe, qui se voulait un des pivots du troisième millénaire, s’est retrouvée prestement marginalisée par le duo anglo-américain, discrète préfiguration de l’«Anglo-sphère», l’alliance Wasp (White Anglo-Saxon Protestant), dont la mise sur pied est préconisée par les disciples de Samuel Huntington, l’auteur du «clash des civilisations», en vue de constituer sous égide anglo-saxon un directoire des pays relevant de la civilisation occidentale, de race blanche (29 pour cent de la population mondiale) pour la direction du «Monde libre».
La refondation de la doctrine stratégique de l’OTAN à l’occasion du 50ème anniversaire de l’alliance atlantique, en mai 1999, par l’adjonction des anciens pays du bloc soviétique, est apparue à cet égard comme un signe précurseur pour les tenants de cette thèse.
Apportant sa caution militaire et diplomatique aux Etats-Unis, sous estimant sa capacité d’influence, l’Europe est ainsi apparue au regard de la communauté internationale comme l’appendice de l’Amérique. Au point que bon nombre d’ observateurs en ont conclu que l’Europe a abdiqué son indépendance pour se résoudre au rôle de promontoire outre-Atlantique de l’Amérique, renonçant à sa vocation ancienne de foyer de civilisation et à sa propre autonomie face aux Etats-Unis pour en faire une roue dentée de la stratégie américain, une « île au large des rives de l’Eurasie», pour reprendre l’expression du géographe Michel Fournier.
En tandem, et sous couvert de grands principes, l’ingérence humanitaire et la guerre contre le terrorisme, à l’aide de sigles abscons, d’Africom au Maghreb, de «Recamp» dans l’Afrique francophone ou d’Eufor (3), dans le centre du continent, le quadrillage occidental de l’Afrique s’est fait en douceur, à l’arrière-plan d’une féroce bataille engagée pour la maîtrise des réserves stratégiques sur le flanc méridional de l’Europe, face aux bouleversements géostratégiques induits par l’émergence de la Chine dans l’ancienne chasse gardée coloniale, notamment en Afrique du Nord et sur continent noir.
Au prétexte de la «guerre contre le terrorisme», les Etats-Unis se sont même employés à mettre sur pied spécialement pour le continent noir un corps d’armée qui portant le nom de «VIII me corps d’armée» américain afin d’achever le maillage militaire de la planète par une présence physique opérationnelle sur l’ensemble des continents. L’AFRICOM dont la création a été décidée en 2007 devait avoir compétence sur les 50 Etats membres de l’Union Africaine, à l’exception de l’Egypte.
Le redéploiement diplomatique et stratégique euro-américain est intervenu sur fond d’exacerbation de la controverse publique sur les bienfaits et les méfaits de la colonisation, son «rôle positif» et ses séquelles, les «test ADN» et les «charters de la honte» en France, l’«immigration choisie» en Europe, alors qu’en contrechamps, la percée chinoise se faisait d’une manière pacifique propulsée par le déficit américain, un consistant matelas financier constitué de plusieurs milliards de dollars de bons de trésor américains sur un continent que n’obère aucun passif colonial de la Chine.
Par son impact psychologique et ses conséquences à long terme, la pénétration chinoise a été comparable à la conquête arabe de la rive méridionale de la Méditerranée qui a brisé le monopole de la navigation et du commerce dans l’ancien «Mare Nostrum» et l’Atlantique sud, déclenchant en retour les Croisades et la colonisation du continent africain en vue de rétablir le statut quo ante. Une percée qui a donné lieu à une féroce guerre psychologique entre Occidentaux et Chinois

La guerre psychologique sino-occidentale

Toute conscience se pose en s’opposant. L’Occident a constamment forgé des concepts pour assurer sa domination sur le reste du Monde. Il en a été de la théorie du «Res Nullus» et du «Fardeau de l’Homme blanc» justifiant les conquêtes coloniales. Au principe de la liberté du commerce et de l’industrie, allant jusqu’à infliger une pernicieuse Guerre de l’Opium à la Chine pour la contraindre à s’ouvrir au marché européen.
Depuis la fin de la II me Guerre mondiale (1939-1945), toute une littérature belliqueuse a développé les thèmes sur le péril rouge (contre le communisme), avant de se rabattre après l’implosion de l’Empire soviétique (1989) sur le péril vert (l’Islam), jalon intermédiaire préludant à la naissance du «péril jaune» (Chine, Inde, Japon) d’actualité avec la montée en puissance des trois pays majeurs d’Asie, qu’ils parachèveront en 2025.
A cette date, l’Occident aura perdu le monopole de la puissance et partant son rôle prescripteur. Il devra, par la force des choses, composer. Dur métier pour celui qui a constamment imposé, dur apprentissage de la diversité. Composer avec les autres composantes de la planète. Cette échéance explique sa frénésie d’acquisition de gages territoriaux et énergétiques (Irak, Afghanistan, Darfour, Balkan) en vue d’aborder la prochaine étape en position de force dans une «stratégie de transformation du réel», qui se réduit en une quête désespérée visant à enrayer un déclin prévisible par le maintien de «Droits acquis» aux faîtes de la puissance.
Accablée de tous les maux, la Chine a été accusée, simultanément et cumulativement, d’avoir contaminé l’Afrique de pathologies potentielles avec la commercialisation de médicaments avariés et d’avoir transformé le continent noir en dépotoir de déchets toxiques, Ce faisant, l’Occident a oublié son rôle néfaste dans la dépossession de l’Afrique de ses richesses pendant cinq siècles, sa dépopulation par la traite négrière, de l’ordre de quinze millions de personnes, dans la modification de son écosystème. En témoignent le film «le Cauchemar de Darwin» (1) sur transformation écologique des lacs de l’Ouganda par l’introduction de la « perche du Nil» pour la satisfaction des besoins alimentaires des consommateurs européens au détriment de la faune et de la flore ougandaise, et le film anglais «The constant Gardner» tiré du roman de l’espion en chef britannique John Le Carré (2) dans le choix de l’Afrique dans sa fonction de lieu d’expérimentation de ses produits pharmaceutiques et de point d’évacuation des surplus toxiques de l’industrie occidentale.
En écho, un journaliste algérien s’est mis au diapason des critiques occidentales, dénonçant les turpitudes des Chinois en Algérie, la prévarication de la classe politique pour l’acquisition de ses marchés en Algérie, le recours abusif à la contrefaçon et au dumping. Devant ce qu’il considère comme une présence envahissante, Kamal Daoud, chroniqueur du Quotidien d’Oran, a mis en garde contre la transformation de «L’Algérie en province chinoise», à la faveur de rixes entre Algériens et Chinois. «La Chine devient un empire en Algérie. Elle a déjà des sous-traitants politiques et financiers. Des agents, honorables correspondants et trop de clients d’ailleurs. «L’Algérie, une province chinoise? Près de 95% des contrefaçons saisies en Algérie, en 2011, sont d’origine chinoise. «Un chiffre qui souligne la mainmise croissante de l’empire du Milieu sur l’économie algérienne, du dentifrice à la construction de la Grande Mosquée. Un raz de marée. Les saisies de produits contrefaits ont enregistré une hausse de 84,5% en Algérie l’an dernier, passant de 379.774 produits saisis en 2010 à 700.000 en 2011», assurent les services des douanes algériennes. Selon les chiffres des douanes algériens justement, «les produits contrefaits proviennent principalement de Chine (94,44%) et de Turquie (3,56%). Au pays de l’hyper nationalisme anti-français, 95% de produits contrefaits viennent de Chine», conclut-t-il dans un éditorial 12 novembre 2012.

La botte secrète de la Chine: absence de passif colonial et non-ingérence.

Menant une diplomatie commerciale agressive, sans ingérence politique, la Chine est parvenue à redessiner la carte des influences traditionnelles «occidentales» sur fond de lutte pour le contrôle des gisements pétroliers avérés ou potentiels.
Un «Nouveau Partenariat Stratégique Afrique‐Asie» a été scellé lors du dernier sommet Chine‐Afrique tenu du 3 au 5 novembre 2006, couronnement d’une coopération amorcée dans la décennie 1970 et dont le projet phare aura été le chemin de fer Tanzanie‐Zambie, le célèbre «chemin de la liberté» (TAZARA, 1976) qui fonctionne depuis 30 ans et qui permettait de contourner les positions racistes de l’Afrique du Sud qui rendait impossible l’exportation de cuivre de Zambie.
Près de 200.000 Chinois seraient actuellement installés en Afrique et près d’un millier d’entreprises chinoises investissent dans 43 pays africains réalisant ainsi 900 projets d’infrastructures. Trente et un pays ont vu leur dette envers la Chine annulée pour une valeur d’environ 1,33 milliards de dollars.
Face à ce stress énergétique, Pékin a mis en place une nouvelle diplomatie «dite du sortir» («Zouchuqu») se traduisant par «une participation dans l’amont et dans l’aval pétroliers internationaux et à l’acquisition de gisements par le biais de prises de participation dans des sociétés locales pour l’établissement de bases pétrolières à l’étranger pour assurer son ravitaillement énergétique régulier.
Les Chinois sont impliqués dans une cinquantaine de projets pétroliers sur tout le continent. En 2006, le continent africain représente 25% de l’approvisionnement chinois en pétrole (principalement le Soudan (6% du pétrole importé par la Chine provient du site de Muglad), l’Angola (30% des importations pétrolières d’Afrique), l’Algérie et l’Afrique du Sud) contre 15 % au milieu des années 1980.
Dans ce contexte, l’Afrique sub‐saharienne, comme le Maghreb, est devenue un théâtre hautement convoité, car depuis leur intervention en Irak, les USA ont renforcé leur contrôle sur l’ensemble des pays du Moyen‐Orient à l’exception de l’Iran. Recelant 8,9% des réserves mondiales de pétrole et offrant 11 % de la production mondiale, l’Afrique permet à Pékin de limiter sa dépendance énergétique (politique dite de déconcentration des risques: Asie Centrale et Sibérie offrant un contournement du Détroit de Malacca jugé vulnérable à une intervention américaine et Afrique.
Il convient néanmoins de s’abstenir de tout angélisme. Le positionnement chinois obéit à des calculs stratégiques sur le long terme. Tous les pays d’Afrique du Nord déplorent un déficit commercial avec la Chine, les produits chinois se situent à des prix 50 à 60% moins chers qu’au Maroc ou en Tunisie. Toutefois, le Maroc, et accessoirement la Tunisie, sont perçus par les autorités chinoises comme des places d’investissement privilégié sur le flanc sud de l’Europe et la Chine, pour ces deux pays du Maghreb, comme un véritable partenaire alternatif à l’ancien pouvoir colonial plus interventionniste.
En parallèle, les Etats-Unis ont multiplié les initiatives diplomatiques et militaires en vue de sceller les pays africains à la stratégie globale américaine. Des points d’intervention favorisant le déploiement rapide des forces américaines ont été aménagés dans la zone sahélienne sénégalo-malienne, ainsi qu’en Namibie à la frontière avec l’Angola.
Des opérations conjointes avec les pays du Sahel ont été lancées en 2003-2004 contre le groupe Salafiste pour la prédication et le combat (GPS) dans le cadre du «programme de contre-terrorisme en Afrique». Les attaques contre les touristes français en Mauritanie en décembre 2007, entraînant l’annulation du rallye automobile Paris-Dakar et son transfert vers l’Amérique latine, de même que l’attentat contre l’ambassade israélienne à Nouakchott témoignent des réticences locales et régionales au déploiement américain en Afrique.
La Chine est depuis 2010 le premier partenaire commercial de l’Afrique avec des échanges de l’ordre de 166,3 milliards de dollars, en augmentation de 83% par rapport à 2009. Les Chinois viennent d’annoncer un doublement à 20 milliards de dollars leurs crédits à l’Afrique, qui fait partie de la réserve stratégique des multinationales.
Soixante ans après l’indépendance de l’Afrique, Américains et Européens, sur fond de lourd contentieux post colonial non purgé, continuent de gérer l’Afrique à travers leurs réseaux politico-affairistes et les institutions multilatérales (FMI et Banque mondiale). Le Mali a été ainsi contraint de se spécialiser dans la production du coton par la Banque mondiale, se plaçant en concurrence avec les producteurs de coton nord-américains qui bénéficient de subventions de la première puissance libérale.
En contrechamp, la Chine, nullement philanthrope, mais infiniment plus perspicace, se présente aux Africains sans passif colonial, sans les criantes pratiques de la corruption des Djembés et des Mallettes, la marque de fabrique de la Françafrique. En l’absence de passif colonial, parangon de la non-ingérence, un vice occidental, pratiquant une politique de dumping ou de nivellement en fonction du pouvoir d’achat local, résultante de la paupérisation croissante de la population du tiers monde, la Chine poursuit sa progression. Et les déboires enregistrés par ses alliés au Soudan, en Libye et au Mali, ne paraissent avoir affectés ses intérêts ni ses positions.
Auparavant, les Etats-Unis surveillaient l’Afrique à travers trois commandements: Central Command (CENTCOM) dont la zone de responsabilité s’étendait sur 27 pays dont sept sont africains, le commandement européen (EUCOM), sa zone couvrant 91 Etats dont 42 sont africains, le commandement pacifique enfin (PACOM) qui a autorité sur une zone couvrant Madagascar et les îles en périphérie de l’est du continent africain.
Si le souci proclamé des Etats-Unis est de mener une guerre planétaire contre le terrorisme, la création d’un commandement spécifique pour l’Afrique marquait d’une manière sous-jacente l’implication plus marquée de l’Amérique dans la compétition que se livrent les grandes puissances pour la conquête des marchés africains particulièrement le pétrole qui fournit 30 pour cent de la consommation mondiale.
Dans l’intervalle, l’administration américaine a aménagé, en 2006-2007, dans le Golfe de Guinée une base flottante, constituée de navires à très grande vitesse (swift ship) servis par un équipage de 300-400 marins pour la surveillance côtière le long des pays riverains: Angola, Cameroun, Gabon, Ghana, Guinée équatoriale, Liberia, Sao-Tomé et Principe, Sénégal et Nigeria. ..Et des bases de drones, dans la décennie 2010, au Burkina-Faso pour la surveillance et le repérage des mouvements djihadistes en Afrique occidentale. Elle se propose de partager avec Alger les données récoltées par ses drones dans le septentrion malien à la faveur de l’intervention française dans cette région frontalière de l’Algérie.
Le dispositif américain en Afrique est complété en Afrique orientale par la colocation de la base française de Djibouti «Le camp Lemonnier», ainsi que de la base aéronavale de Diego Garcia dans l’Océan indien, et par le nouveau rôle de gendarme confié à l’Ethiopie dans sa répression des mouvements islamistes dans la zone, notamment en Somalie.
Le positionnement américain à Djibouti, face au Golfe, permet en outre le contrôle stratégique de la route maritime qu’emprunte un quart de la production pétrolière mondiale et, ce faisant, de dominer l’extrémité orientale de la vaste bande pétrolière traversant l’Afrique considérée désormais comme vitale pour leurs intérêts stratégiques, une bande allant de l’oléoduc Higleg-Port Soudan (1600 km) dans le sud-est à l’oléoduc Tchad-Cameroun (100 km) et au Golfe de Guinée dans l’Ouest. Un poste d’opération américain en Ouganda donne en outre aux Etats-Unis la possibilité de contrôler le sud-Soudan où se trouve le gros des réserves soudanaises de brut.

Le lièvre américain et la tortue chinoise, une fable à l’échelle planétaire – En point de Mire – Actualité et Flashback

Le lièvre américain et la tortue chinoise, une fable à l’échelle planétaire – En point de Mire – Actualité et Flashback

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Chine-Afrique: Le lièvre américain et la tortue chinoise, une fable à l’échelle planétaire 1/4

Paris-Le nouveau président chinois Xi Jinping chinois a réservé à l’Afrique son premier déplacement officiel, dans une démarche symbolique qui illustre la vivacité de la rivalité sino occidentale sur le continent noir et la prépondérance que la Chine y a prise au détriment de ses deux anciens maitres, le Royaume Uni et la France, qu’elle a supplantée en deux décennies.
Autre message codé, à valeur hautement significative, le dirigeant chinois s’est rendu le 26 Mars en Afrique du Sud pour une visite d’Etat au pays vainqueur de l’apartheid, avant le sommet des pays émergents des BRICS tenu le lendemain à Durban.
Pretoria a constitué la première étape d‘une tournée en Afrique comprenant notamment le Congo-Brazzaville, fief français de l’Afrique centrale ou il s’est rendu les 29 et 30 mars pour des entretiens avec son homologue Denis Sassou Nguesso.

Les paramètres de départ: La «théorie de anneaux maritimes» des Etats-Unis et la «stratégie du collier de perles» de la Chine

  • «La théorie des anneaux maritimes»
Les grands bouleversements de l’histoire ont rarement une date d’anniversaire exacte. Ce n’est qu’arbitrairement que l’on peut fixer à la fin de la deuxième Guerre mondiale (1939-1945) le début du déploiement planétaire de l’empire américain et de sa compétition feutrée avec la Chine, dont le point de percussion majeur aura pour théâtre l’Afrique à l’entame du XXI me siècle, particulièrement le Maghreb, le Ponant du Monde arabe, le flanc méridional de l’Europe et son point de jonction vers l’Afrique et, au-delà, l’Amérique latine.
Premier continent au Monde pendant cinq siècles, l’Europe de la seconde moitié du XXe siècle, a subi, sanction de son bellicisme, la division en deux blocs, hermétiquement verrouillés par un rideau de fer. Saignée et ruinée par deux guerres mondiales, son volet occidental placé sous perfusion financière américaine du Plan Marshall, menant un combat d’arrière-garde face à la révolte des peuples coloniaux d’Asie, du Monde arabe et d’Afrique. Ce combat d’arière garde face à l’Inde et le Pakistan, les futures puissances nucléaires, le Monde arabe, le principal réservoir énergétique de la planète, le continent africain, vaste gisement minier, ont signé sa relégation de la magistrature suprême de gestion des affaires du Monde.
Une conjoncture idéale pour les Etats Unis, qui s’engouffreront dans la brèche, sur les débris du colonialisme anglais et français en Asie occidentale et en Afrique, à la faveur de l’ostracisation de la Chine continentale communiste de Mao Tsé Toung au bénéfice de la Chine insulaire capitaliste de Taiwan de Tchang Kai Check, le vaincu du Kominterm.
En application de la «théorie des anneaux maritimes», ils vont procéder, dès la fin de la 2me Guerre mondiale, à leur déploiement géostratégique selon la configuration de la carte de l’Amiral William Harrison, conçue en 1942 par la marine américaine, en vue de prendre en tenaille la totalité du monde eurasiatique, articulant leur présence sur un axe reposant sur trois positions charnières: Le détroit de Behring, le Golfe arabo-persique et le détroit de Gibraltar,
Avec pour objectif de provoquer une marginalisation totale de l’Afrique, une marginalisation relative de l’Europe et à confiner dans un cordon de sécurité un «périmètre insalubre» constitué par Moscou-Pékin-Delhi-Islamabad, contenant la moitié de l’humanité, trois milliards de personnes, mais aussi la plus forte densité de misère humaine et la plus forte concentration de drogue de la planète.
Héritiers de l’Europe et témoins privilégiés de ses déboires, les Etats-Unis se sont certes portés à deux reprises au XX me siècle au cours des deux guerres mondiales (1914-1918/1939-1945), au secours des grandes démocraties européennes avant de les supplanter en tant que puissance planétaire, sans toutefois- là réside le Hic- tirer profit des égarements coloniaux de leurs ancêtres européens.
Sur les débris du colonialisme français et anglais, l’Amérique, soutenant les indépendances du Maroc et de l’Algérie dans la foulée de la folle équipée tripartite (anglo-franco-israélienne) de Suez, en 1956, a été accueillie en héros par les peuples arabes. Mais, au mépris des enseignements de l’Histoire, elle va fonder son hégémonie sur une collusion avec les forces arabes les plus conservatrices et des alliances contre nature avec les principaux ennemis du monde arabe, dilapidant ainsi son capital de sympathie par une politique erratique illustrée par le combat implacable qu’elle a menée contre le nationalisme arabe renaissant. Deuxième erreur fatale qui permettra à la Chine, dans la décennie 1960, d’en tirer profit en y prenant pied, en Asie occidentale et en Afrique du Nord, notamment l’Algérie, son plus ancien et plus loyal allié dans la zone.
  • la stratégie du collier de perles
Pris en tenaille entre l’Inde, sa grande rivale en Asie, les Etats-Unis, maitre d’œuvre du blocus de la chine maoïste et le Japon, le géant économique de l’Asie, et les Etats-Unis, maitre d’œuvre du blocus de la chine maoïste, la Chine va chercher à se dégager de ce nœud coulant en développant «la stratégie dite du collier de perles». Le terme a été utilisé pour la première fois au début de 2005 dans un rapport interne du Département d’Etat titré «Energy Futures in Asia».
Cette stratégie, mise au point dans le but de garantir la sécurité de ses voies d’approvisionnement maritimes jusqu’au Moyen-Orient, ainsi que sa liberté d’action commerciale et militaire, consistait dans le rachat ou la location pour une durée limitée d’installations portuaires et aériennes échelonnées des ports de Gwadar (Pakistan), Hambantoa (Sri Lanka), Chittagong (Bangladesh), jusqu’à Port Soudan, via l’Iran et le périmètre du golfe d’Aden pour escorter ses navires à travers cette zone infestée de pirates, ainsi que dans la zone sahélo-saharienne, l’Algérie et la Libye, à tout le moins sous le régime du Colonel Mouammar Kadhafi (1969-2012), soit pendant 43 ans.

Les enjeux de puissance: Pétrole et surpopulation sur fond de militarisation des voies maritimes.

  • Du bon usage des principes universels. Le principe de la Liberté de navigation où les océans nouveau monde du XXIème siècle. (1)
Les grands principes universalistes répondent rarement à des considérations altruistes et obéissent plutôt à des impératifs matériels. Il a en a été ainsi du principe de la liberté de la navigation brandie par l’Angleterre au XVII me et XVIIIe siècles pour assurer sa suprématie maritime et partant son hégémonie commerciale à l’ensemble de la planète. Il en a été de même du mot d’ordre du principe de la Liberté du commerce et du libre-échange décrété par les pays occidentaux au XIXe et XXe siècles pour contraindre la Chine à écouler les marchandises occidentales sur son marché intérieur au nom de la «politique de la porte ouverte». Il en sera de même du «principe de la liberté d’information» fermement défendu par les États-Unis, au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale pour asseoir leur suprématie idéologique dans les quatre domaines qui conditionnent la puissance: politique, militaire, économique et culturel.
Le principe de la liberté de navigation, principe en apparence anodin, masque de redoutables enjeux géostratégique, résumé il y a deux siècles par le contre-amiral Alfred Thayus Mahan (1840-1914): «Quiconque atteindra la suprématie maritime dans l’océan Indien serait un joueur important sur la scène internationale”, soutenait-il déjà au siècle dernier ce géo stratège de la Marine des Etats-Unis.
Le surpeuplement prévisible de la terre, dont la population va pratiquement doubler en un siècle passant de six milliards d’humains, en l’an 2000, à onze milliards en l’an 2100 c’est-à-dire davantage qu’au cours de toute l’histoire de l’humanité, va faire de la quête de nouveaux espaces, un nouvel enjeu de la compétition mondial, l’enjeu de survie de l’espèce humaine.
La conquête de l’espace en est une illustration spectaculaire. La mer est plus familière à l’Homme que l’espace, plus intimement liée à l’histoire de l’humanité. La conquête des espaces maritimes, moins spectaculaire, n’en est pas moins méthodique. Omniprésents à la surface du globe, les Océans représentent 71 pour cent de la surface de la planète, avec une mention spéciale pour le Pacifique qui occupe, à lui seul, 50 pour cent de la superficie océanique mondiale. Si, depuis la haute antiquité, la mer a constitué un espace de jonction et de rapprochement entre les peuples, elle a aussi servi de théâtre à de retentissants combats navals (Trafalgar, Sawari), surtout appréciée par les stratèges en tant que lieu idéal de projection des forces à distance.
Le développement de prospection pétrolière off-shore, du câblage sous-marin et de la surexploitation de la pêche ont fait des océans un gigantesque gisement de ressources naturelles et animales.
Cinquante pour cent de la population mondiale vit sur une mince bande côtière de 50 kms le long des rivages et 75 pour cent du commerce mondial en poids, et 66 pour cent en valeur est assuré par le transit maritime, près de dix milliards de tonnes par an.
L’exploitation des ressources maritimes à, elle, quadruplé en 40 ans, passant de 20 millions de tonnes en 1950 à 80 millions de tonnes en 1990. La FAO estime, quant à elle, à quarante millions le nombre de personnes dans le monde vivant de l’économie du poisson, la filière pêche remployant, à elle seule, douze millions de personnes réparties entre pêcheurs, techniciens, artisans et commerçants.
La militarisation des voies maritimes figure d’ailleurs parmi les objectifs de Washington dans cette zone de non droit absolu qui relie la Méditerranée à l’Asie du Sud-est et à l’Extrême-Orient par le canal de Suez, la mer Rouge et le golfe d’Aden. Dans ce périmètre hautement stratégique, les Etats Unis ont procédé au plus important déploiement militaire hors du territoire national, en temps de paix.
Le Monde arabe regroupe trois des principales voies de navigation transocéaniques, mais n’en contrôle aucune. Le détroit de Gibraltar, qui assure la jonction entre l’Océan Atlantique et la Mer Méditerranée, est sous observation de la base anglaise située sur le promontoire de Gibraltar, une enclave située sur le territoire de l’Espagne. La jonction Méditerranée-Mer Rouge est sous le contrôle des bases anglaises situées aux deux extrémités du Canal de Suez, les bases de Dekhélia et d’Akrotiri à Chypre, à l’entrée du canal par la Méditerranée et la base de Massirah au Sultanat d’Oman, à sa sortie.
Enfin, le passage golfe arabo persique Océan indien est sous l’étroit contrôle du chapelet de bases de l’Otan: le camp franco-américain de Djibouti, la base aéronavale française d’Abou Dhabi, le QG du Centcom du Qatar, et la base aéronavale américaine de Diego Garcia.
En vertu du principe de la liberté de navigation, la totalité des voies de passage transocéaniques, à l’exception du Détroit de Behring, sont sous contrôle de l’Occident. Du Détroit de Gibraltar au Détroit du Bosphore, au Détroit des Dardanelles, au Détroit de Malacca, au détroit d’Ormuz. La Chine a d’ailleurs réussira à contourner ce goulot d’étranglement en ce que sa «stratégie du collier de perles» lui a permis d’aménage d’un chapelet de ports amis le long de ses voies de ravitaillement, atteignant le cœur de l’Europe, avec la zone franche du Pirée.
«Usine du monde», la Chine importe aujourd’hui environ 30% de son pétrole. Selon les estimations de l’Agence pour l’Energie, elle importera 85% de son pétrole en 2025. L’équation énergétique chinoise place la Chine en situation «d’état d’urgence» d’approvisionnement énergétique qui explique son offensive à triple nouveau.
La recherche de bases-relais et de fournisseurs s’est accompagnée, parallèlement, de la modernisation significative de sa marine afin de contrôler les routes maritimes assurant son approvisionnement (sécuriser la route maritime vitale reliant les champs pétrolifères du Golfe persique à Shanghai en passant par le détroit d’Ormuz, le détroit de Malacca et le détroit de Formose, zone caractérisée par une forte présence des marines américaines et britanniques).

Référence

1- Du Bon usage des principes universels, notamment du principe de la liberté de navigation, Cf. «Golfe: les enjeux sous-jacents du détroit d’Ormuz : http://www.renenaba.com/golfe-arabo-persique-les-enjeux-sous-jacents-du-detroit-d-ormuz/
«Justice internationale: Posture ou imposture» : http://www.renenaba.com/justice-penale-internationale-posture-ou-imposture/
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vendredi 21 juin 2013

BMCE Bank et le Maroc, hubs pour le business chinois en Afrique | Lnt.ma

BMCE Bank et le Maroc, hubs pour le business chinois en Afrique | Lnt.ma


Othman-Benjelloun
Le groupe bancaire BMCE Bank et la Chambre de commerce et d’industrie chinoise pour l’Afrique (CAJ-CCI) ont signé, mercredi à Casablanca, un mémorandum d’entente visant à développer les relations économiques entre le Maroc et la Chine et à faciliter les courants d’affaires entre cette puissance asiatique et les différents pays africains.
Le mémorandum d’entente, signé par le Président directeur général de la BMCE Bank, Othman Benjelloun, et le secrétaire général adjoint du CAJ-CCI, Wei Gao, devrait faciliter “le développement des relations d’investissement et de commerce extérieur entre le Maroc et la Chine et, plus globalement, à la promotion de toute initiative de nature à accélérer les échanges économiques et à fluidifier les courants d’affaires entre la Chine et les pays d’Afrique”, selon un communiqué de la banque.
L’accord permettra à CAJ-CCI d’apporter “sa parfaite connaissance du marché chinois et à BMCE Bank d’offrir l’accès à son vaste réseau bancaire local africain qui s’étend, à travers sa filial Bank of Africa, à une vingtaine de pays”, ce qui confirme la vocation de hub régional aspirée par le Maroc au niveau continental, ajoute la même source.
Par ailleurs, les deux partenaires comptent organiser conjointement, dans les mois prochains, une rencontre d’envergure, qui réunira des opérateurs chinois, marocains et africains afin d’échanger sur les multiples opportunités d’affaires et de coopérations économiques.
Enfin, en réponse à une question de la presse, le Président Othman Benjelloun a annoncé que des pourparlers avancés étaient en cours avec la Banque centrale de Chine pour l’ouverture d’une représentation de BMCE Bank à Shanghai. On rappellera à ce sujet que BMCE Bank dispose déjà d’un bureau de représentation à Pékin, ouvert en octobre 2000 déjà

jeudi 20 juin 2013

Révolutions chinoises dans le commerce africain

Révolutions chinoises dans le commerce africain
Un fantasme hante la communauté internationale, mal à l'aise face à une nouvelle réalité : les investissements chinois enfermeraient les économies africaines dans une spécialisation appauvrissante, qu'elle soit agricole, énergétique ou minière.
Ce livre bat en brèche ces idées reçues, hormis le cas de certains pays "faillis". Les produits agricoles sont en effet minoritaires dans les échanges sino-africains, et les produits chinois concurrencent plus les marques occidentales que les fabrications locales.
Des exceptions existent, comme au Nigeria, au Cameroun, au Kenya ou en Afrique du Sud, car ces pays disposent de tissus industriels qui les mettent en concurrence avec les produits chinois, y compris... en Chine.
Enfin, la diaspora chinoise a créé des milliers de sociétés ignorées des statistiques internationales. Au travers d'études de cas, de l'Afrique du Sud au Zimbabwe, le

mercredi 19 juin 2013

MAROC • L'empire du Milieu tisse sa toile dans le royaume | Courrier international

MAROC • L'empire du Milieu tisse sa toile dans le royaume | Courrier international
Etudiants, hommes d’affaires ou fonctionnaires : de plus en plus de Marocains souhaitent apprendre le mandarin. Un engouement sur lequel surfe la Chine, qui vient notamment d'ouvrir un deuxième institut Confucius dans le pays.
Le deuxième institut Confucius a ouvert ses portes en janvier 2013, à Casablanca - AFPLe deuxième institut Confucius a ouvert ses portes en janvier 2013, à Casablanca - AFP

C'est un fait, les citoyens de l'un des plus beaux pays du monde se mettent à la langue chinoise. Et si l'on ne peut pas encore parler de véritable mode ou de phénomène, il n'en reste pas moins que l'apprentissage du chinois se développe peu à peu.
Le premier institut Confucius (organisme culturel public à but non lucratif) s'est installé à la faculté des lettres de Rabat en 2009, le deuxième a vu le jour en janvier 2013 à l'université Hassan-II de Casablanca. Depuis 2005, sur le continent africain, 31 instituts ont été créés dans 26 pays différents. Des chiffres qui témoignent de la volonté de l'empire du milieu d'étendre son rayonnement culturel à l'étranger. Une stratégie qui fait son bonhomme de chemin...
Ni grammaire, ni conjugaison
"Ni lei ma ?" ("Etes-vous fatigués ?") demande Doume à ses élèves, qui répondent par la négative. Après une dictée éprouvante, place à la prononciation. Un exercice fastidieux mais nécessaire, puisque le mandarin est une langue monosyllabique et tonale (quatre tons). Par exemple, la syllabe "ma", suivant les tonalités, peut signifier "mère", "cheval", "chanvre" ou "injurier". De quoi provoquer des malentendus et des fous rires parmi les 15 élèves. La méthode pédagogique : répétition, pratique et répétition, une technique qui semble bien fonctionner. Alors qu'ils ne sont qu'au stade de novices, les étudiants maîtrisent déjà les quatre tons et les formules de politesse quotidiennes.
Si baragouiner quelques mots à l'oral s'acquiert facilement, l'écriture du chinois n'est pas chose aisée puisqu'il s'écrit sous formes d'idéogrammes (symbole graphique représentant un mot), aussi appelés sinogrammes, et il en existe plus de 6 000. "Pour avoir des bases solides, il faut au minimum une année de formation", explique la directrice de l'institut.
Néanmoins, cette langue a beaucoup d'avantages. L'écriture chinoise, qui peut s'apparenter à de la calligraphie, permet de faire travailler la mémoire visuelle. Et, surtout, il n'y a ni grammaire ni conjugaison. Les professeurs, qui sont au nombre de cinq, viennent tous de Chine. Pour pouvoir dispenser des cours à l'institut, la condition sine qua non est la maîtrise d'une autre langue : le français, l'anglais ou l'arabe, à l'instar de Doume qui a choisi de venir enseigner au Maroc pour améliorer son niveau d'arabe.
Rayonnement culturel
"Les médias parlent sans arrêt du réveil de la Chine, alors qu'elle a toujours été éveillée et pas nous !" déclare Mohamed Salhi, vice-doyen de la faculté de lettres de Rabat. Assis à son bureau, lunettes sur le nez, il estime que le XXIe siècle sera asiatique ou ne sera pas. "Lorsqu'ils veulent quelque chose, ils l'obtiennent, on le voit bien en Afrique. En Tanzanie, l'institut Confucius a construit un village entier."
Premier investisseur sur le continent noir, troisième partenaire commercial du Maroc, la Chine s'implante toujours plus : importation des produits made in China (21 milliards de dirhams marocains en 2011 [1,87 milliard d'euros]), chantiers de construction d'infrastructures, implantations d'usines, etc. Et, pour pérenniser ses relations économiques avec le royaume chérifien, la Chine intensifie son rayonnement culturel. D'autant qu'elle a besoin d'une main-d'œuvre capable de maîtriser sa langue : "Les entreprises chinoises installées ici choisissent des étudiants de la faculté pour venir travailler avec elles." De son côté, la faculté organise des séjours auprès des organismes touristiques chinois pour attirer de nouveaux professeurs dans le pays. "On reçoit des centaines de demandes", affirme Mohamed Salhi.
Des bourses pour étudier en Chine
La faculté de Rabat a aussi créé une filière intitulée Langue et culture chinoises qui délivre une licence après trois années de cours. Pour sa première année d'existence, celle-ci compte 22 étudiants. Au programme : cours de langue bien sûr, mais aussi enseignement de l'histoire, de l'économie, de la littérature, du chant et même du tai-chi-chuan, un dérivé des arts martiaux qui développe la maîtrise de soi et les techniques de respiration. Après l'obtention de la licence, les élèves qui le souhaitent pourront aller à l'université internationale de Pékin pour continuer en master et en doctorat.
"Nous offrons des bourses de trois ou six mois aux étudiants souhaitant poursuivre leurs études en Chine. Ceux qui s'engagent à devenir professeurs de mandarin dans notre faculté peuvent bénéficier d'une bourse d'un an, explique Mohamed Salhi, qui se montre évasif quant à son montant. En effet, elle n'est pas très élevée, mais l'inscription universitaire, le logement et l'accès à tous les services du campus sont gratuits." D'ici quatre ans donc, l'université de Rabat accueillera ses premiers professeurs de chinois de nationalité marocaine.
"L'appétit linguistique" des Marocains
Le profil des élèves est assez éclectique : étudiants, hommes d'affaires, fonctionnaires, seniors et même quelques militaires. Les motivations varient d'un individu à l'autre. Abdellah, étudiant à l'Ecole normale supérieure, a été encouragé par sa sœur, qui apprend le chinois depuis plusieurs années : "Quand je l'ai vue écrire, ça m'a tout de suite plu.". Youssouf, son camarade, a décidé, lui, de suivre cette formation à l'institut pour augmenter ses chances de sélection pour la licence intitulée Langue et culture chinoises : "Actuellement, je suis étudiant en droit mais j'aimerais cumuler des compétences. En plus, je suis convaincu que le chinois est une langue d'avenir."
Du côté des hommes d'affaires, les raisons sont d'ordre professionnel, car il faut être capable de communiquer avec les partenaires commerciaux. Mais les raisons pratiques ou professionnelles n'expliquent pas tout. Selon Mohamed Salhi, le tropisme des Marocains pour le chinois s'explique aussi par "l'appétit linguistique" des citoyens du royaume. Curieux, ouverts aux différences, les Marocains aiment manier les langues. "Le chinois nous paraît exotique, et c'est pour cela que cette langue nous attire", conclut le vice-doyen

mardi 18 juin 2013

La Chine lance deux nouveaux fonds d'investissement d'un milliard en Afrique

La Chine lance deux nouveaux fonds d'investissement d'un milliard en Afrique
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Les deux fonds devraient chacun réunir 1 milliard de dollars. ©AFP
Le China-Africa Business Council (CABC) et le Fonds sino-africain pour le développement (CADFund) vont lancer deux nouveaux fonds d'investissements d'un milliard de dollars chacun, pour stimuler les investissements chinois en Afrique.
[B]Lire aussi : [/B][IMG]/images/stories/Finance/drapeau_chinois_AFP.jpg[/IMG]
Les deux fonds devraient chacun réunir 1 milliard de dollars. ©AFP
Le China-Africa Business Council (CABC) et le Fonds sino-africain pour le développement (CADFund) vont lancer deux nouveaux fonds d'investissements d'un milliard de dollars chacun, pour stimuler les investissements chinois en Afrique.
[B]Lire aussi : [/B]
[LINK=/regions/afrique-subsaharienne/16404-les-10-pays-africains-qui-attirent-le-plus-d-investissements-chinois.html]Les 10 pays africains qui attirent le plus d'investissements chinois[/LINK]
[LINK=/regions/afrique-subsaharienne/12260-dossier-chine-afrique-entre-mythes-et-realites.html]Dossier Chine-Afrique : entre mythes et réalités[/LINK]
[LINK=/regions/afrique-subsaharienne/16952-laide-chinoise-au-developpement-decryptee.html]L'aide chinoise au développement décryptée[/LINK]
Premier partenaire commercial de l'Afrique, la Chine ne veut pas s'arrêter là. L'annonce du lancement de deux nouveaux fonds d'investissement par le China-Africa Business Council (CABC) et le Fonds de développement sino-africain (CADFund), relayée jeudi 13 juin par le groupe de médias le DailyChina, en est une nouvelle preuve.
Les deux fonds devraient chacun réunir, au cours de l'année, 1 milliard de dollars auprès d'entreprises chinoises et du CADFund, le plus grand capital-investisseur public chinois spécialisé sur l'Afrique. Leur objectif sera de stimuler les investissements de la Chine en Afrique et ils fourniront spécifiquement des capitaux aux entreprises chinoises actives dans le commerce et le secteur minier sur le continent.
[B]Transformation industrielle[/B]
"La Chine veut investir de façon différente en Afrique, au lieu de se concentrer uniquement sur les projets d'infrastructure tels que les routes, les ponts, les ports et les stades à travers le continent" a expliqué Zheng Yuewen, président du CABC, une ONG qui promeut les intérêts de 550 entreprises chinoises présentes en Afrique.
Celui-ci a annoncé plus de délocalisations d'usines chinoises en Afrique dans les années à venir. "L'Afrique peut connaitre la même transformation industrielle que la Chine il y a trois décennies, et à terme, devenir un grand producteur de marchandises, plutôt que d'être simplement un expéditeur de matières premières vers différentes destinations à l'étranger", a prédit Zheng Yuewen.
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Premier partenaire commercial de l'Afrique, la Chine ne veut pas s'arrêter là. L'annonce du lancement de deux nouveaux fonds d'investissement par le China-Africa Business Council (CABC) et le Fonds de développement sino-africain (CADFund), relayée jeudi 13 juin par le groupe de médias le DailyChina, en est une nouvelle preuve.
Les deux fonds devraient chacun réunir, au cours de l'année, 1 milliard de dollars auprès d'entreprises chinoises et du CADFund, le plus grand capital-investisseur public chinois spécialisé sur l'Afrique. Leur objectif sera de stimuler les investissements de la Chine en Afrique et ils fourniront spécifiquement des capitaux aux entreprises chinoises actives dans le commerce et le secteur minier sur le continent.
[B]Transformation industrielle[/B]
"La Chine veut investir de façon différente en Afrique, au lieu de se concentrer uniquement sur les projets d'infrastructure tels que les routes, les ponts, les ports et les stades à travers le continent" a expliqué Zheng Yuewen, président du CABC, une ONG qui promeut les intérêts de 550 entreprises chinoises présentes en Afrique.
Celui-ci a annoncé plus de délocalisations d'usines chinoises en Afrique dans les années à venir. "L'Afrique peut connaitre la même transformation industrielle que la Chine il y a trois décennies, et à terme, devenir un grand producteur de marchandises, plutôt que d'être simplement un expéditeur de matières premières vers différentes destinations à l'étranger", a prédit Zheng Yuewen.

La Chine pilote-t-elle l'économie mondiale?

La Chine pilote-t-elle l'économie mondiale?
La Chine, désormais deuxième puissance économique mondiale, affirme son poids sur tous les marchés de la planète. Alors que les pays avancés redoutent la compétitivité de ses produits, elle en profite pour réclamer des facilités accordées aux pays en voie de développement. Et Pékin, fort de l'appui des Brics (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud), manie à merveille la carotte et le bâton, les promesses et les menaces.

lundi 17 juin 2013

Jean-Yves Ollivier: Leçons chinoises en Afrique

Jean-Yves Ollivier: Leçons chinoises en Afrique
L’honorable Younoussi Touré, président de l’Assemblée nationale PI

Le nouveau parti créé par le jeune Amadou Koïta, le Parti Socialiste (PS Yelen Kura) s’est engagé à soutenir le candidat de l’Union pour la République et la Démocratie (URD) Soumaïla Cissé, lors de la présidentielle du 28 juillet prochain.

Les deux partis ont signé une Plate-forme d’alliance, en fin d’après-midi du vendredi 14 juin dans la salle de conférence de DFA Communication. Par la signature de cette alliance, le PS yelen Kura s’engage à soutenir le candidat de l’URD dès le premier tour de la présidentielle de juillet prochain. La Plate-forme précise également que cette alliance peut, à tout moment, se transformer en une fusion entre les deux partis.

Au cours de cette cérémonie de signature, le Président de l’URD, Younoussi Touré, est largement revenu sur le parcours politique du Président du PS Yelen Kura, ancien leaders estudiantin et ancien Président des jeunes du défunt Mouvement citoyen. Il a présenté Amadou Koïta comme un leader de jeunes qui bénéficie d’une forte aura auprès de la jeunesse malienne. Ce qui lui a fait dire qu’avec la signature de cette Plate-forme d’alliance, «en réalité, c’es la jeunesse malienne qui nous a rejoint». C’est pourquoi, il s’est dit heureux pour son parti d’accueillir Koïta et ses compagnons. Car, a-t-il estimé, «c’est la relève qui est assurée». Pour Younoussi Touré, le PS est jeune par son âge, «mais assurément c’est une formation politique avec laquelle il faut compter dans les années à venir».


Dans son intervention, le Président du PS est revenu sur les raisons de son choix de soutenir le candidat de l’URD. Il a précisé que c’est une décision qui a été unanimement prise par son parti. Cette décision a été prise par 15 sections sur 19 de son parti, de préciser l’orateur. Les critères qui ont prévalu au choix de Soumaïla Cissé sont : « l’appartenance au F.D.R, avoir un sens élevé du patriotisme, incarner les vertus de probité et d’intégrité morale, disposer d’un projet de société à la hauteur des défis que doit relever le peuple malien, bonne gouvernance, sécurité, paix, éducation et réservant une place de choix aux jeunes et aux femmes pour leur insertion socioprofessionnelle, avoir de la rigueur, de la compétence, une expérience et une expertise avérées dans la gestion de l’Etat». Concernant l’appartenance au FDR, Koïta a tenu à être on ne plus clair : «le P.S a répondu oui, car le parti a reconnu tout le travail de l’U.R.D au sein du F.D.R et M. Soumaïla Cissé a été l’un des rares candidats, pendant les moments les plus difficiles, a être présents à la Bourse de travail pour défendre la Constitution, la République et la démocratie».


Par conséquent, le Président du PS a déclaré que «les liens qui nous unissent ce soir sont d’abord ceux du cœur et des sentiments partagés, ce qui nous rassemble c’est la foi dans le Mali, un Mali de paix, un Mali réconcilié avec lui-même. Donc rien ne peut et ne doit ébranler cette alliance».
Youssouf Diallo

22septembre

jeudi 13 juin 2013

Barack Obama et le mystère Xi Jinping

Barack Obama et le mystère Xi Jinping
Barack Obama et Xi Jinping, le 8 juin.
Barack Obama et Xi Jinping, le 8 juin. | AFP/JEWEL SAMAD

Que peuvent-ils bien se dire ? Xi Jinping, chemise blanche déboutonnée au col, chevelure noir brillant lissée au cordeau, et Barack Obama, chemise bleu pâle, pantalon sport, arpentent un gazon impeccable. Sous le soleil du Sud californien, le président chinois et son homologue américain discutent de l'avenir de leurs pays : les numéros un et deux de l'économie mondiale se jugent, se jaugent, s'observent – bref, apprennent à se comprendre.
La rencontre a duré deux jours, les vendredi 7 et samedi 8 juin. Elle s'est tenue au sud-est de Los Angeles, à la Fondation Annenberg, du nom d'un des géants de la presse américaine qui fit construire là, en plein désert, dans l'oasis de Palm Springs, une résidence d'hiver à l'allure princière : structure ultramoderne posée sur un tapis de verdure, en bordure de lac artificiel et de forêt de cactus, avec, en toile de fond, la masse brune des montagnes de San Jacinto. Ici, les artères célèbrent les grands noms du show-business. Décisive pour l'avenir du XXIe siècle, la relation sino-américaine se joue dans un paysage de western, entre les boulevards Bob Hope et Frank Sinatra. On ne peut pas faire moins exotique.
M. Xi a volontiers accepté l'invitation, mais a préféré dormir dans un hôtel voisin. Le président chinois a eu peur, suggère la presse, des écoutes téléphoniques... La rencontre est sans équivalent. Les deux hommes ont eu près de huit heures de discussions, entrecoupées de promenades et d'un dîner. Leurs prédécesseurs n'ont jamais passé autant de temps ensembl...

mercredi 12 juin 2013

Jean-Yves Ollivier: Leçons chinoises en Afrique

Jean-Yves Ollivier: Leçons chinoises en Afrique
Concurrence , International , Investissement , Partenariat , Petrole , Relations-Chine-Afrique , Ressources Naturelles , Actualités

AFRIQUE - Toutes les chapelles cherchent aujourd'hui à s'approprier les succès de la Chine en Afrique. Politiques et investisseurs saluent le "pragmatisme" chinois quand les "droits de l'hommistes" vilipendent les méthodes et les intentions de Beijing.
Pourtant, les faits sont têtus. 83ème partenaire commercial du continent en 1996, l'empire du Milieu est désormais numéro deux, derrière les États-Unis, et toujours sur sa lancée d'une croissance fulgurante.
Depuis le début du 21ème siècle, les échanges sino-africains sont passés de 20 à 220 milliards de dollars. Plus de 2.000 entreprises chinoises se sont implantées au sud du Sahara.
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Alors, y a-t-il une "recette chinoise" que les partenaires traditionnels de l'Afrique auraient intérêt à copier? La réponse est moins tranchée que ne le font accroire aussi bien les thuriféraires que les pourfendeurs de la percée chinoise en Afrique.
Du fait de son succès, la Chine en Afrique est devenue un grand réservoir de "leçons" à tirer -chacun y puisant la sienne, celle qui l'arrange le mieux. Les hommes d'affaires occidentaux redécouvrent ainsi les charmes des grands projets d'infrastructures tandis que les hommes politiques tournent le dos à la bonne gouvernance en Afrique -"une idée moralisatrice et hypocrite, sinon néocoloniale"- pour épouser à nouveau le réalisme, qui était de mise pendant la Guerre froide.
"Faire comme les Chinois" veut alors dire, pour les uns, réinvestir massivement dans le BTP et, pour les autres, redevenir l'ami des gouvernements africains, quitte à les suivre dans de nouvelles folies. Est-ce réellement ce que font "les" Chinois? Pour commencer, n'en déplaise à une vision monolithique du géant asiatique, les pouvoirs publics à Pékin, les grandes compagnies chinoises opérant à l'échelle mondiale et la multitude des individus cherchant à faire fortune en dehors de la Chine, ce sont là trois acteurs bien distincts.
Savoir qui, du gouvernement ou du grand business, orchestre la ruée sur les matières premières en Afrique est loin d'être toujours évident. Quant aux particuliers, ils ont suivi le mot d'ordre officiel lancé en 1995, zou chuqu, "sortez!". Ils sont désormais entre 500.000 et un million à vivre en Afrique, l'immense majorité d'entre eux loin des bases de vie grillagées des méga-projets très en vue.
La vraie "Chinafrique" tisse sa toile dense à l'intérieur des pays africains, souvent au village. Ensuite, si la Chine officielle faisait seulement plaisir au pouvoir du jour, comment expliquer, par exemple, qu'au Soudan divisé en deux elle se trouve en excellente position des deux côtés?
Des Occidentaux en nombre seraient-ils prêts à aller vivre à la dure dans la brousse africaine? Poser la question, c'est y répondre. Or, pas de tissu économique sans présence humaine, du moins pas au niveau des PME, qui sont d'une importance capitale en Afrique. Par la même occasion, finissons-en avec un autre mythe: non, l'industrie occidentale ne damera pas le pion à ses concurrentes chinoises en vendant des casseroles d'émail multicolores et des sandales en plastique dans la poussière des marchés africains. À ce niveau, coûts salariaux obligent, elle n'est pas compétitive.
D'où l'idée du "coup de pouce politique". Tout dépend de ce que l'on entend par là. Si c'est pour rappeler aux gouvernements leur intérêt à faire du lobbying pour l'industrie nationale, on enfonce une porte ouverte -tous les gouvernements le font déjà. En revanche, si c'est pour réclamer des garanties d'État à l'exportation et des montages financiers ponctionnant les surplus en devises des finances publiques, on rêve. L'Occident, surendetté et en panne de croissance, n'en a pas les moyens, sans parler de ses opinions publiques qui dénonceraient avec virulence des "cadeaux" faits aux entreprises au moment où l'État providence fait peau de chagrin. Faut-il pour autant regretter de ne pas vivre sous une dictature industrialisante? La perspective est différente pour un chef d'État africain. Il aura sa route, son stade ou son hôpital qu'il pourra inaugurer avant la prochaine élection, alors que l'Occident videra sa promesse de moult études d'impact et de faisabilité, qui enrichiront l'homme qui a vu l'homme qui attend un début de réalisation.
Le pétrole africain représente à lui seul 71% des importations chinoises du continent noir. En y ajoutant les minerais, le bois tropical et quelques produits agricoles, il n'y a pour ainsi dire rien qui reste. Ce qui revient à dire qu'avec la Chine maintenant, comme avec l'Occident depuis deux siècles, "l'échange inégal" continue: l'Afrique vend ses matières premières non transformées et achète les produits manufacturés des autres. On sait de quel côté se trouve la plus-value. Ce qui devrait suffire à river le clou aux démagogues, qui prétendent que l'Afrique va se développer "grâce à la Chine". Si c'était vrai, le continent serait développé depuis un certain temps déjà, grâce à l'Occident.
N'y aurait-il donc rien à apprendre du succès chinois en Afrique? Bien au contraire. La première leçon, c'est qu'il n'y a pas de miracle. D'abord, les Chinois gagnent des marchés parce qu'ils sont prêts à faire ce à quoi les Occidentaux se refusent, à tort ou à raison. Cela va de la vente de beignets sur le bord de la route à l'aide "liée", qui n'est déboursée qu'au profit d'entreprises chinoises, en passant par la tenue de fastueux sommets sino-africains, sans campagne de presse pour vilipender les hôtes que l'on voudrait gagner comme clients - une spécialité occidentale.
Ensuite, il n'y a pas de miracle non plus au niveau de la percée elle-même. La Chine prend ce qui est à prendre sur le marché pétrolier en Afrique, qui est en expansion. Cependant, les places fortes y sont prises depuis longtemps. Enfin, en 2012, la Chine a réalisé 220 milliards de dollars d'échanges avec l'Afrique. Mais est-ce vraiment miraculeux étant donné que les États-Unis ont réalisé 447 milliards de dollars, et l'Union européenne même 567 milliards, avec quatre fois moins d'habitants?
La seconde leçon est la plus importante. Le succès de la Chine en Afrique repose sur la poursuite d'intérêts clairement affichés et assumés, en l'absence d'une mission civilisatrice. Cette dernière, dont le passé lucratif fut le colonialisme, consiste à prescrire aux autres comment ils doivent vivre -prétendument ou réellement mieux, c'est toute la question. S'il revient toujours aux Occidentaux d'en décider, alors ils pourront continuer de monter des opérations "militaro-humanitaires" pour changer les cours de l'histoire.
En revanche, si l'Afrique est réellement indépendante, et donc responsable de son sort, elle devra apprendre à se passer des urgentistes extérieurs, y compris dans la nuit noire d'une dictature ou en cas de massacres à grande échelle. Et que l'on ne m'objecte pas la "responsabilité à protéger", qui serait universelle.
Nous savons tous que ce droit d'ingérence est plus susceptible de s'appliquer à l'Afrique qu'à... la Chine. La troisième et dernière leçon devrait être une évidence: il faut savoir non seulement ce que l'on veut et ce que l'on peut mais, aussi, qui on est. Quand un Africain s'engage avec un Européen, il voit, par-delà l'individu en face, l'ancien colonisateur, l'éternel donneur de leçon, le "Blanc". En revanche, quand un Africain s'engage avec un Chinois, il voit quelqu'un qui, hier, était tout aussi pauvre et méprisé que lui mais qui, à présent, impose son point de vue aux anciens maîtres du monde. Bref, il voit son propre rêve devenu réalité. En ce sens, la vraie percée de la Chine en Afrique serait la naissance d'un esprit d'émulation. Attendons voir.

Suivre Jean-Yves Ollivier sur Twitter: www.twitter.com/JeanY_Ollivier

Denis Sassou N’Guesso: L'Afrique n'a pas peur de la Chine

Denis Sassou N’Guesso: L'Afrique n'a pas peur de la Chine
La visite ce weekend du président chinois Xi Jinping à Brazzaville, à l'occasion de sa première tournée à l'étranger, est un immense honneur pour le Congo et la concrétisation d'un partenariat exceptionnel entre nos deux pays.
Je suis fier d'avoir accueilli symboliquement le quart de l'humanité pour une visite historique qui illustre la qualité de la relation sino-africaine. N'en déplaise à certains, l'Afrique est engagée dans une relation gagnant-gagnant de long-terme avec la Chine.
L'Afrique n'a pas peur de la Chine
Il ne faut pas croire les discours amers de certains commentateurs. L'Afrique n'a pas peur de la Chine et n'a aucune raison de redouter ce partenariat égalitaire et pragmatique basé sur nos intérêts communs, et libéré des considérations morales et de la condescendance qui constituent parfois encore les plaies visibles de l'héritage colonial.
A l'échelle du continent, les chiffres parlent d'eux-mêmes. Le volume des relations commerciales avec la Chine est passé de 10 milliards à 160 milliards de dollars entre 2000 et 2011, et la Chine représente aujourd'hui le deuxième partenaire commercial de l'Afrique après les Etats-Unis. La ruée sur les matières premières, promise par les "spécialistes" ne demeure qu'un fantasme et selon les derniers chiffres du FMI, les exportations africaines vers la Chine sont sensiblement similaires à celles réalisées par les Etats-Unis ou l'Union européenne.
Le partenariat entre l'Afrique et la Chine s'inscrit pleinement dans cette logique et se base sur le pragmatisme et le respect mutuel. Quand nous, Africains, travaillons avec nos amis Chinois, c'est une promesse d'avenir meilleur que nous avons sous les yeux : un peuple qui à force de travail et d'obstination a pris en l'espace d'une génération la voie de l'émergence et qui fait aujourd'hui entendre sa voix au même titre que les Européens ou les Américains.
En ce qui concerne la République du Congo, nos deux pays avancent depuis un demi-siècle (nous célèbrerons en 2014 cinquante ans d'amitié sino-congolaise) sur la voie d'un partenariat exemplaire qui a notamment permis à notre pays de se doter d'infrastructures que nous n'aurions pas pu financer autrement. La Chine nous a notamment accompagné dans la construction de l'aéroport international Maya Maya, la route lourde Pointe-Noire Brazzaville, le barrage hydroélectrique d'Imboulou, réalisations vitales pour notre développement économique.
Ce partenariat s'approfondit encore et toujours entre nos deux pays. Nous comptons lancer dans les mois à venir divers nouveaux projets tels que la construction d'un port minéralier à Pointe-Noire ainsi que plusieurs barrages hydroélectriques à travers le pays.
L'Afrique, la Chine et les BRICS : des convergences naturelles
Au-delà de notre relation avec la Chine, et comme l'a démontré le récent sommet des BRICS de Durban, l'Afrique doit continuer à se rapprocher des économies émergentes. Notre continent a besoin de leurs investissements et de leur savoir-faire et les BRICS ont besoin de l'Afrique pour développer leurs économies et étendre leurs marchés.
Ces intérêts convergents bien compris font des partenariats Sud-Sud l'une des clés de voute de la croissance mondiale de l'avenir. Et la Chine, par son poids économique et géopolitique, est la locomotive naturelle de cette nouvelle donne économique.
Une nouvelle donne qui a pris de la consistance avec l'annonce cette semaine en Afrique du Sud de la création d'une banque des BRICS et de l'Afrique, plus à même que le FMI ou la Banque Mondiale de comprendre les intérêts des économies à fortes croissances et de les soutenir efficacement.
C'est dans ce contexte de coopération accrue entre les BRICS et l'Afrique que j'ai reçu le président Xi Jinping. C'est un grand honneur pour moi et les 4,3 millions de Congolais d'avoir été les hôtes de la première visite officielle au Congo d'un président de la République populaire de Chine.
Une visite historique pour nos deux pays

Les Chinois à la conquête de l'Afrique

Les Chinois à la conquête de l'Afrique
Le Ghana Et La Chine





INTERNATIONAL - Ce n'est pas une nouveauté, la Chine a investi énormément sur le continent africain. Depuis 2000, elle y a consacré plus de 75 milliards de dollars, ce qui la place juste derrière les Etats-Unis (qui atteignent 90 milliards de dollars). Le Ghana a été le principal bénéficiaire de l'argent chinois.
Mais cette présence chinoise -que certains n'hésitent pas à qualifier de puissance coloniale- engendre des débordements. De nombreux Chinois se rendent dans des pays africains afin d'exploiter clandestinement leurs richesses, or en tête.
Les efforts du Ghana pour stopper la ruée vers l'or
Le Ghana, deuxième exportateur d'or du continent derrière l'Afrique du Sud et pôle de stabilité en Afrique de l'Ouest, est le plus touché par cette vague.
A coups d'arrestations et d'expulsions, le pays cible désormais les Chinois qui viennent exploiter clandestinement ses mines d'or. Mais cette ruée illégale vers le métal précieux semble d'autant plus difficile à arrêter que les frontières sont poreuses et les fonctionnaires corruptibles.
168 étrangers ont été arrêtés mercredi 5 juin dans différentes régions, un mois après le lancement par le président John Dramani Mahama d'une vaste opération contre les exploitations minières illégales, notamment dans la région d'Ashanti (au centre du pays).
Les Chinois formaient l'essentiel des étrangers interpellés, mais on comptait aussi six Russes parmi eux, a précisé le porte-parole des services d'immigration du Ghana, Francis Palmdeti.
Le mois dernier, des agents d'une force conjointe spéciale -formée par la police, les services de l'immigration et de la sécurité nationale- avaient effectué une descente dans les mines d'or pour en chasser les clandestins auxquels les autorités reprochent notamment de polluer les rivières et de dégrader l'environnement.
La Chine condamne ses ressortissants clandestins
L'ambassade de Chine a annoncé qu'elle facilitait le rapatriement des Chinois impliqués dans ces activités minières et plus de 200 d'entre eux se sont présentés volontairement, selon Francis Palmdeti.
Un cadre de l'ambassade de Chine à Accra, Yu Jie, a assuré que les ressortissants chinois quittaient les zones d'exploitation de l'or de l'intérieur du pays. Quant au nombre total de Chinois impliqués dans ces activités, il s'est dit incapable de l'évaluer.
Mais l'analyste financier Sydney Casely-Hayford l'assure: la répression n'arrêtera pas cette exploitation minière dont sont complices aussi bien les dirigeants traditionnels ghanéens que les hommes d'affaires. "C'est de l'argent facile, vite gagné", dit Casely-Hayford. "Il n'y a rien à faire parce que les autorités traditionnelles veulent l'argent, les exploitants veulent l'argent, les Chinois veulent l'argent: ils veulent l'or."
Le Ghana et la Chine multiplient les accords
Les Chinois ont commencé à affluer vers le Ghana, un pays de 27 millions d'habitants, ces dernières années. Le contexte semble d'autant plus favorable qu'une importante activité commerciale lie les deux pays et que Pékin ne cesse de développer ses investissements sur tout le continent africain pour ouvrir de nouveaux marchés et accéder aux ressources naturelles pétrolières, minières, etc.
Grand producteur d'or, le Ghana dispose aussi d'une industrie pétrolière naissante, qui a commencé à produire en 2010. Le géant chinois des hydrocarbures Sinopec est actuellement chargé d'y réaliser un grand projet de construction d'infrastructures gazières.
En 2011, le gouvernement ghanéen avait cité des chiffres fournis par la Chine selon lesquels 500 hommes d'affaires chinois développaient des activités au Ghana, dans le secteur de l'énergie ou encore pour la construction de routes.

L'or ghanéen attise les convoitises
Mais les Chinois ne sont pas les seuls à se ruer sur l'or ghanéen: 57 ressortissants de pays ouest-africains ont également été récemment arrêtés pour leur implication dans l'exploitation illégale des mines. Parmi eux, on comptait 51 Nigériens, deux Togolais, un Nigérian et trois hommes se disant Ghanéens.
Selon Francis Palmdeti, d'autres arrestations auront lieu. "Nous continuerons jusqu'au moment où nous estimerons que ce secteur de l'économie a été assaini", assure-t-il.
Mais de l'avis de Vladimir Antwi-Danso, directeur du Centre Legon des Affaires internationales et de la diplomatie, la répression n'est pas suffisante pour stopper cette extraction illégale. Le véritable problème, dit-il, c'est la corruption des fonctionnaires locaux qui a permis aux mines clandestines de proliférer dans l'intérieur du Ghana. "Nous avons des lois et des réglementations dans ce pays. Pourquoi avons-nous besoin d'une force opérationnelle spéciale?", interroge-t-il.
Le Ghana est victime de son développement qui attire sur son sol de nombreux étrangers venus exploiter clandestinement ses richesses. Si la Chine investit beaucoup, officiellement pour régler les dettes des pays africains et les aider au développement, les Ghanéens commencent à voir d'un mauvais oeil cette implantation qui s'attaque désormais aux petits commerces.
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Les Chinois à la conquête de l'Afrique

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Le Ghana Et La Chine





INTERNATIONAL - Ce n'est pas une nouveauté, la Chine a investi énormément sur le continent africain. Depuis 2000, elle y a consacré plus de 75 milliards de dollars, ce qui la place juste derrière les Etats-Unis (qui atteignent 90 milliards de dollars). Le Ghana a été le principal bénéficiaire de l'argent chinois.
Mais cette présence chinoise -que certains n'hésitent pas à qualifier de puissance coloniale- engendre des débordements. De nombreux Chinois se rendent dans des pays africains afin d'exploiter clandestinement leurs richesses, or en tête.
Les efforts du Ghana pour stopper la ruée vers l'or
Le Ghana, deuxième exportateur d'or du continent derrière l'Afrique du Sud et pôle de stabilité en Afrique de l'Ouest, est le plus touché par cette vague.
A coups d'arrestations et d'expulsions, le pays cible désormais les Chinois qui viennent exploiter clandestinement ses mines d'or. Mais cette ruée illégale vers le métal précieux semble d'autant plus difficile à arrêter que les frontières sont poreuses et les fonctionnaires corruptibles.
168 étrangers ont été arrêtés mercredi 5 juin dans différentes régions, un mois après le lancement par le président John Dramani Mahama d'une vaste opération contre les exploitations minières illégales, notamment dans la région d'Ashanti (au centre du pays).
Les Chinois formaient l'essentiel des étrangers interpellés, mais on comptait aussi six Russes parmi eux, a précisé le porte-parole des services d'immigration du Ghana, Francis Palmdeti.
Le mois dernier, des agents d'une force conjointe spéciale -formée par la police, les services de l'immigration et de la sécurité nationale- avaient effectué une descente dans les mines d'or pour en chasser les clandestins auxquels les autorités reprochent notamment de polluer les rivières et de dégrader l'environnement.
La Chine condamne ses ressortissants clandestins
L'ambassade de Chine a annoncé qu'elle facilitait le rapatriement des Chinois impliqués dans ces activités minières et plus de 200 d'entre eux se sont présentés volontairement, selon Francis Palmdeti.
Un cadre de l'ambassade de Chine à Accra, Yu Jie, a assuré que les ressortissants chinois quittaient les zones d'exploitation de l'or de l'intérieur du pays. Quant au nombre total de Chinois impliqués dans ces activités, il s'est dit incapable de l'évaluer.
Mais l'analyste financier Sydney Casely-Hayford l'assure: la répression n'arrêtera pas cette exploitation minière dont sont complices aussi bien les dirigeants traditionnels ghanéens que les hommes d'affaires. "C'est de l'argent facile, vite gagné", dit Casely-Hayford. "Il n'y a rien à faire parce que les autorités traditionnelles veulent l'argent, les exploitants veulent l'argent, les Chinois veulent l'argent: ils veulent l'or."
Le Ghana et la Chine multiplient les accords
Les Chinois ont commencé à affluer vers le Ghana, un pays de 27 millions d'habitants, ces dernières années. Le contexte semble d'autant plus favorable qu'une importante activité commerciale lie les deux pays et que Pékin ne cesse de développer ses investissements sur tout le continent africain pour ouvrir de nouveaux marchés et accéder aux ressources naturelles pétrolières, minières, etc.
Grand producteur d'or, le Ghana dispose aussi d'une industrie pétrolière naissante, qui a commencé à produire en 2010. Le géant chinois des hydrocarbures Sinopec est actuellement chargé d'y réaliser un grand projet de construction d'infrastructures gazières.
En 2011, le gouvernement ghanéen avait cité des chiffres fournis par la Chine selon lesquels 500 hommes d'affaires chinois développaient des activités au Ghana, dans le secteur de l'énergie ou encore pour la construction de routes.

L'or ghanéen attise les convoitises
Mais les Chinois ne sont pas les seuls à se ruer sur l'or ghanéen: 57 ressortissants de pays ouest-africains ont également été récemment arrêtés pour leur implication dans l'exploitation illégale des mines. Parmi eux, on comptait 51 Nigériens, deux Togolais, un Nigérian et trois hommes se disant Ghanéens.
Selon Francis Palmdeti, d'autres arrestations auront lieu. "Nous continuerons jusqu'au moment où nous estimerons que ce secteur de l'économie a été assaini", assure-t-il.
Mais de l'avis de Vladimir Antwi-Danso, directeur du Centre Legon des Affaires internationales et de la diplomatie, la répression n'est pas suffisante pour stopper cette extraction illégale. Le véritable problème, dit-il, c'est la corruption des fonctionnaires locaux qui a permis aux mines clandestines de proliférer dans l'intérieur du Ghana. "Nous avons des lois et des réglementations dans ce pays. Pourquoi avons-nous besoin d'une force opérationnelle spéciale?", interroge-t-il.
Le Ghana est victime de son développement qui attire sur son sol de nombreux étrangers venus exploiter clandestinement ses richesses. Si la Chine investit beaucoup, officiellement pour régler les dettes des pays africains et les aider au développement, les Ghanéens commencent à voir d'un mauvais oeil cette implantation qui s'attaque désormais aux petits commerces.
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» L'Afrique n'a pas peur de la Chine

mardi 11 juin 2013

Afrique : l’obstacle français (Par Sanou MBAYE)

Afrique : l’obstacle français (Par Sanou MBAYE)
Ces dernières années, la Chine et l’Afrique ont formé l’un des partenariats économiques et commerciaux les plus florissants de l’ère moderne. La Chine bénéficie du pétrole, des ressources minérales et des marchés africains, tandis que les échanges commerciaux et les investissements chinois en matière d’infrastructures, de santé, d’éducation, de Pme et de faibles et moyennes technologies profitent à l’Afrique.

Certains observateurs occidentaux – et africains, aussi – ont dénoncé les participations de la Chine sur le continent comme une nouvelle forme de colonialisme. Mais une telle critique est parfaitement déplacée. Le modèle de développement que la Chine facilite, et qui associe des investissements et des échanges commerciaux productifs à des prêts et à de l’aide, permet de rompre le cycle de sous-développement en Afrique – un objectif auquel les stratégies de développement occidentales ne sont pas parvenues.
De plus, les pays africains s’appuient sur leurs relations avec la Chine pour développer leur coopération avec d’autres marchés émergents, dont l’Inde, la Corée du Sud, la Turquie, le Brésil et la Malaisie. De tels efforts ont renforcé la demande globale pour les matières premières, tout en permettant une diversification des économies africaines et une relance de la capacité productive des fournisseurs locaux. Aujourd’hui, le taux de croissance de l’Afrique se place en deuxième position après celui de l’Asie.
Il se peut que ce ne soit que le début. Le marché africain compte aujourd’hui un milliard d’individus, et il devrait exploser à trois milliards en 2045 – dont 1,1 milliard d’individus en âge de travailler (plus que la Chine ou l’Inde) ; ses perspectives économiques et commerciales à long terme rappellent donc celles de la Chine à l’époque où elle s’ouvrait au monde il y a plus de trente ans.
Ces développements incitent les investisseurs américains et européens à revoir leurs stratégies en Afrique pour une redéfinition des termes d’échanges avec un intérêt renouvelé pour les marchés régionaux en expansion de ce continent.
Le progrès, cependant, n’a pas été distribué de manière équitable dans toute l’Afrique. Certains pays, comme par exemple le Ghana, le Nigeria, le Kenya, l’Ethiopie, l’Afri­que du Sud, le Rwanda, l’Ouganda, l’Angola, le Mozam­bique, et le Zimbabwe – ont bénéficié de ma­nière substantielle des participations chinoises, et sont parmi les économies dont la croissance est la plus rapide au monde. Mais d’autres, dont les quatorze pays réunis en zone Franc (dont 12 sont des anciennes colonies françaises) – ne profitent pas des importants investissements chinois, et passent à côté du boum économique africain.
Aux difficultés de la zone Franc s’ajoutent des politiques monétaires et économiques tronquées et dysfonctionnelles. La croissance du Pib de la Communauté financière africaine (Cfa) était largement supérieure à celle du reste de l’Afrique dans les années 90, mais elle est depuis en recul. De plus, la zone Franc doit encore établir un régime tarifaire extérieur commun fonctionnel, et les échanges commerciaux internes de cette zone Franc ne se montent qu’à 12% des importations et exportations totales de ses membres.
Dans ce contexte, la décision de préserver le franc Cfa, une monnaie commune librement convertible étalonnée à l’euro à un taux de change substantiellement surévalué, est douteuse. Le système actuel engendre des déficits budgétaires structurels, une dépendance excessive sur les importations, une corruption endémique, du blanchiment d’argent, des trafics de drogues, et une évasion massive des capitaux.
Ce qui pose problème en particulier sont les réserves de change de 17,7 milliards de dollars que la France préserve sur un compte spécial du Trésor à un taux d’intérêt de seulement 1,5%, assurant ainsi la convertibilité du franc Cfa qu’elle garantit. En d’autres termes, la France utilise les réserves africaines pour financer une partie de son déficit budgétaire à un taux d’intérêt concessionnel.
Dans le même temps, les ban­ques françaises appliquent des taux de 5 à 6 % sur les prêts qu’elles accordent aux gouvernements africains afin de financer leurs déficits budgétaires. Avec un taux appliqué aux prêts commerciaux de 18%, les crédits bancaires accordés au secteur privé de la zone Franc ne représentent plus que 12,7% du Pib ; ils sont à 36,5% du Pib en Afrique sub-saharienne et à 78,9% en Afrique du Sud, première économie de la région.
Le Premier ministre sénégalais, Abdoul Mbaye, a déclaré que les taux d’intérêt élevés constituent un frein majeur à la croissance du Pib. Et en novembre dernier, lors de la conférence organisée à l’occasion du cinquantième anniversaire de la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest, le Président sénégalais Macky Sall a plaidé pour une baisse des taux d’intérêt.
Mais ni le quasi contrôle de l’argent et du crédit par la France ni sa forte influence sur la politique et la sécurité ne peuvent être tenus pour uniquement responsables de la situation de pauvreté et d’instabilité dans laquelle se retrouvent les pays de la zone Franc. En s’appropriant à tort les fonds publics pour leur usage personnel, les dirigeants de la zone Franc sont aussi complices de l’exploitation institutionnalisée par la France des pays Cfa et de leurs citoyens.
La Côte d’Ivoire, première économie de cette zone Franc, était un exportateur net de riz au début des années 70, jusqu’à ce que l’élite du pays suive les conseils des expatriés français d’importer du riz plutôt que de le produire. Grâce aux licences d’importation, le ministre des Finances de l’époque, Konan Bédié, a gagné son premier mil­liard de francs Cfa en moins d’un an. A la même époque, Félix Houphouët-Boigny, ancien Prési­dent ivoirien et figure de proue des mouvements d’indépendance africains, avertissait publiquement les Africains des risques de préserver leur fortune en Afrique.
Plus récemment, Karim Wade, fils de l’ancien Président sénégalais Abdoulaye Wade, a été arrêté pour présomptions d’enrichissement personnel pour un montant d’environ 1,5 milliard de dollars accumulés au cours de la Prési­dence de son père, alors qu’il occupait différents postes ministériels.
Il est temps pour les dirigeants de la zone Franc de rompre ce cycle, et de définir des stratégies nationales efficaces de développement pour leur pays. Ils devraient commencer par s’émanciper totalement de la France, abandonner le franc Cfa, et développer des relations avec la Chine, et d’autres pays, désireux d’établir des relations commerciales mutuellement bénéfiques avec l’Afrique.


Sanou MBAYE
Economiste et écrivain sénégalais,
auteur de L’Afrique au secours
de l’Afrique,
Editions de Atelier, Ivry, 2009.
Copyright : Project Syndicate, 2013.
www.project-syndicate.org
Traduit de l’anglais par Frédérique Destribats