CHINE AFRIQUE

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mardi 31 juillet 2012

Thierry Pairault : Les pays africains face à la Chine | RESAP

Thierry Pairault : Les pays africains face à la Chine | RESAP

Thierry Pairault : Les pays africains face à la Chine

30 juillet 2012
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Nos approches des relations entre la Chine et les pays africains se focalisent soit sur ce que nos craintes nous suggèrent, soit sur ce qu’elles ne sont déjà plus. On lit et retient que la Chine serait la deuxième puissance mondiale. Très malheureuse, cette expression est réminiscente d’une époque de la guerre froide où l’on savait qui étaient les « bons » et les « méchants », la Chine se voyant assigner ce second rôle. Malgré ses succès, la Chine n’est encore fondamentalement qu’un pays en développement. Si la Chine était un pays africain, elle se rangerait au dixième rang du continent en termes de création de richesses par tête en parité de pouvoir d’achat. L’indice de développement humain donne de la Chine une image légèrement plus favorable et la place au cinquième rang des pays africains. Que la Chine puisse jouer un rôle de plus en plus important dans l’économie mondiale ne signifie pas qu’elle puisse convertir sa course aux matières premières et aux débouchés en une stratégie de domination des autres États en particulier africains. Inversement, sa demande de ressources naturelles et sa recherche de nouveaux marchés la conduit forcément à influencer peu ou prou les choix stratégiques des États partenaires. Aussi n’est-il pas étonnant que certains voient la présence chinoise comme une chance pour l’Afrique tandis que d’autres la considèrent comme néfaste et contraire à la paix, à la prospérité et à la démocratie.
Il est donc extrêmement difficile de jeter un regard froid sur l’implication économique de la Chine en Afrique. Toutefois les données statistiques (rares et disparates) ne témoignent d’aucune mainmise de la Chine sur l’Afrique mais manifestent un opportunisme qui in fine est celui de tous les pays importateurs. Si l’Afrique peut apparaître en bonne place parmi les fournisseurs de la Chine, c’est moins le résultat de sa politique africaine que celui d’une stratégie de diversification des sources en fonction de leur disponibilité tant quantitative que politique. De 2000 à 2010, dans le commerce mondial des combustibles et des minerais, la part des approvisionnements d’origine africaine a été de 12,1%. Celle des approvisionnements chinois de ces mêmes produits d’origine africaine est passée de 4,4% à 16,6% tandis que, pour l’ensemble des économies développées, ces deux derniers chiffres s’établissent respectivement à 73,0% et 63,3%. La question n’est donc pas de savoir si la Chine dominerait l’Afrique mais de remarquer que les pays développés craindraient de perdre une domination jusqu’alors incontestée. Si le poids de la Chine est croissant, c’est parce que l’essor du commerce mondial exagère son rôle : 60% des importations chinoises sont le fait d’entreprises étrangères en Chine et 60% des exportations chinoises sont le fait de ces mêmes entreprises. La Chine importe des matières premières africaines pour être transformées sur son territoire et consommées par les pays développés.
L’essor récent des relations entre la Chine et les pays africains est le plus souvent étudié en termes géostratégiques. De telles approches révèlent le rôle joué par la Chine mais tendent à en estomper les particularités. C’est pourquoi il importe de centrer notre réflexion sur les différents acteurs confrontés à la présence chinoise en Afrique. En nous focalisant sur la variété des acteurs, l’image moins simplificatrice que l’on en retire manifeste que la « stratégie chinoise en Afrique » se décline en une multiplicité de stratégies répondant chacune à une logique propre.
Thierry Pairault est directeur de recherches émérite au CNRS. Il est membre du Centre Chine de l’EHESS où il anime un séminaire sur l’économie et la société de la Chine et où il dirige un groupe de réflexion sur les relations entre la Chine et les pays africains

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