CHINE AFRIQUE

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lundi 30 juillet 2012

La Chine double ses crédits à l'Afrique : pourquoi on ne doit pas s’enthousiasmer - le Plus

La Chine double ses crédits à l'Afrique : pourquoi on ne doit pas s’enthousiasmer - le Plus

La Chine double ses crédits à l'Afrique : pourquoi on ne doit pas s’enthousiasmer

Modifié le 25-07-2012 à 15h51
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PLUS. Les 19 et 20 juillet, la Chine a annoncé qu'elle doublait ses crédits à l'Afrique, lors de la cinquième conférence sur la coopération sino-africaine. Une décision qui marque un tournant économique, mais surtout la soumission de l'ensemble des pays africains, estime Lucien Pambou.

Édité par Rozenn Le Carboulec   Auteur parrainé par Maxime Bellec
Cinquième conférence sino-africaine
Le président sud-africain Jacob Zuma serrant la main du président chinois Hu Jintao, lors la conférence sino-africaine (A.WONG/AFP).

La fin de la conférence ministérielle (20 juillet 2012), plus exactement le forum économique entre la Chine et l’Afrique, a livré son verdict. La Chine est le premier partenaire de l’Afrique devant les pays occidentaux, la Banque mondiale et le Fonds monétaire.

En 2000, le montant officiel des transactions entre la Chine et l’Afrique était de dix milliards de dollars. En 2011 ce montant est passé à 166 milliards. Les présidents africains – Yayi Boni du Bénin et président en exercice de l’Union africaine, Alassane Ouattara de Côte d’Ivoire et président en exercice de la Cédéao – sont tous satisfaits, car la Chine estime que la période 2013/2015 est considérée comme celle de la rénovation des relations sino-africaines.

Quand la Chine vend du rêve aux Africains

Avant la sixième conférence qui se tiendra en Afrique du Sud, la Chine a tout promis :

 1. Former des talents africains grâce à des bourses d’étude aux étudiants (on parle de 18.000 étudiants),

 2. Contribuer à la formation de cadres africains (on parle de 30.000),

 3. Former des centres pilotes agricoles pour aider l’Afrique à mettre la question agricole au cœur de son développement,

 4. Développer les infrastructures trans-régionales et transnationales pour favoriser le commerce inter et intra-africain, ce qui permet entre autres de marginaliser les objectifs politiques et économiques du NEPAD (Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique, qui s’est surtout distingué par des rapports multiples et par une inefficacité réelle),

 5. Promouvoir des relations économiques gagnant-gagnant, en permettant à l’Afrique et à la Chine de tirer des avantages compétitifs de leurs relations contractuelles,

 6. Pas d’ingérence dans le modèle de gouvernance politique des pays africains, à l'inverse de ce qu’ont toujours voulu et décidé les pays occidentaux dans leurs relations avec l’Afrique.

Ces éléments de conclusion de la conférence font plaisir aux Africains. En revanche, ils ignorent que la Chine est d’abord une puissance économique. Même si elle s’adresse aux pays africains en déclinant l’appartenance à un même espace qu’eux (à savoir pays en développement), elle n’oublie pas ses intérêts économiques, et malheureusement les pays africains, prompts à partager les délices de la consommation, acceptent les diktats des relations contractuelles imposées par la Chine.

Les Africains réduits à l'état de consommateurs passifs

On a souvent critiqué les relations de domination des pays africains par les Occidentaux. La Chine ne fait pas mieux. En revanche, elle élimine un obstacle dans ses relations contractuelles : le respect des droits de l’Homme et la bonne gouvernance politique dont elle n’a rien à faire.

Les pays africains, comme d’habitude, sont hypnotisés et se livrent corps et âme à l’"acupuncture" chinoise qui se contente, comme hier l’Occident, de les laisser dans un état de consommateurs passifs. Elle leur fournit des produits de consommation et des équipements technologiques de basse qualité dont ils ne pourront pas juger la durabilité car les pays africains, sous l’influence de l’Occident, ont préféré développer les sciences humaines au lieu d’investir les champs scientifiques et technologiques.

L’Afrique qui danse, l’Afrique joyeuse, l’Afrique qui consomme, l’Afrique qui ne s’occupe ni de sciences ni de technologie, l’Afrique couverte par les pandémies (sida, tuberculose, paludisme, accidents de la route, systèmes de soins défaillants, niveau du système éducatif en régression, corruption, fausse démocratisation des systèmes politiques), l’Afrique qui reste soumise et dominée, hier par les Occidentaux, aujourd’hui par la Chine.

Une main-d'œuvre pas chère et soumise

Dans ses relations contractuelles avec la Chine, l’Afrique devrait faire ce que la Chine a fait avec l’Europe : signer des contrats qui obligent un réel transfert de technologie, une participation chinoise au capital de l’entreprise et, au bout d’un certain délai, une "chinisation" totale de la gouvernance économique de l’entreprise.

Les dirigeants africains sont-ils capables d’adopter le modèle économique que les Chinois imposent à l’Occident ? J’ai bien peur que non, car les Africains ne mettent pas l’accent sur les systèmes scientifiques et techniques de production des biens et des services. Ils se contentent d’être consommateurs. De plus, les compétences des techniques et des cadres ne sont pas considérées, on préfère des choix ethniques dans la sélection des personnels, peu importe qu'ils soient compétents. Il s’agit de faire triompher l’ethnie, la région, aux dépends de l’État et de la nation, ce qui n’a pas échappé aux dirigeants chinois.

Les Chinois imposent à l’Afrique un "nouveau" modèle économique avec l’assentiment passif et oisif des dirigeants africains et de leurs populations. Il y a 2.000 entreprises chinoises en Afrique qui travaillent avec des contremaîtres, des ouvriers chinois. Une partie infime de l’activité est laissée aux Africains, simples ouvriers payés avec des salaires de misère avec l’accord des dirigeants politiques africains.

Mais que font les dirigeants africains ?

À la différence des Occidentaux qui, en Afrique, vivent dans des quartiers réservés, certains Chinois vivent comme les populations africaines, dans les mêmes quartiers qu’elles et se livrent à des activités informelles dans les villages les plus reculés. Ce qui conduit à une nervosité et à des manifestations des populations africaines contre une présence chinoise qui commence à devenir massive.

Voilà les prémisses du modèle politico-économique que la Chine impose à l’Afrique, au-delà des civilités politiques. La Chine veut et va conquérir l’Afrique, qui regorge de matières premières agricoles et minérales, avec l’assentiment des dirigeants africains qui s’enthousiasment et qui demeurent incapables de négocier un modèle de transfert technologique utile pour le développement économique mais surtout productif pour les pays africains.

En restant consommateurs et en acceptant ce statut, les dirigeants africains condamnent la population africaine, dont l’évolution est estimée à deux milliards d’ici 2050, à rester consommatrice passive et à être fondamentalement marginalisée, même si l’Afrique attire aujourd'hui les investissements et obtient des taux élevés de croissance de la production marchande. Le problème est que les populations africaines ne bénéficient pas des retombées de cette croissance et que celle-ci profite avant tout aux investisseurs étrangers, occidentaux hier et aujourd’hui, chinois aujourd’hui et demain.

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