L'Indépendant - Editorial - L’Asie conquiert l’Afrique: "Les Européens ont colonisé l’Afrique grâce au fer et au feu. Ils ont fait couler le sang, les larmes et la sueur des populations africaines. Aujourd’hui, la République populaire de Chine se lance à la conquête du continent noir. La différence avec l’Europe, c’est que la Chine use de sa diplomatie, de sa coopération et des échanges mutuellement avantageux. Il n’y a pas de doute que l’Asie, c’est-à-dire la Chine, l’Inde et le Japon va supplanter l’Europe en Afrique. Ce n’est pas dans l’intérêt de l’Afrique de dédaigner ses relations avec ce continent qui totalise à lui seul plus de la moitié des habitants de la planète pour s’acoquiner avec l’Europe, un continent en déclin sur de nombreux plans. C’est une politique de courte vue que de négliger la Chine au profit d’un autre pays. De la période de l’Esclavage ou Commerce triangulaire qui est un crime que contre l’humanité, en passant par la colonisation, les Européens ont soumis les Africains par le fusil, le couteau et la cravache. La Chine qui sort à peine du sous-développement vient à l’Afrique les mains chargées des principes de la coopération et non des mains portant le sabre, l’arquebuse et le goupillon. Elle vient pour instaurer une coopération d’égal à égal, mais non avec des fers pour assujettir. La querelle née en 1949 entre la Chine et sa province rebelle Taiwan ne doit pas préoccuper outre mesure les Africains. Car que feront-ils le jour où Taiwan rejoindra le giron maternel ? Qu’on pense à l’exemple de la République Fédérale d’Allemagne (RFA) et de la République démocratique allemande (RDA). Le régime communiste qui est installé à Pékin actuellement n’est en aucun cas un obstacle à la réunification des deux entités. Le cas de Hong Kong est là pour le prouver. Là où les héritiers de Konrad Adeneaur et Henric Honeker ont réussi, ceux de Mao Zedoung et Tankei Tchek peuvent aussi réussir. C’est une question de temps. Qui pouvait, il y a vingt ans prévoir que l’Union des Républiques Socialistes Soviétiques allait disparaître ? L’avenir aujourd’hui appartient à la République populaire de Chine. Le président de la République populaire de Chine, M. Hu Jintao a entrepris depuis le 23 avril une tournée en Afrique. Le dirigeant du pays le plus peuplé du monde, 1,309 milliard d’habitants a visité le Maroc, le Nigeria et le Kenya. Il faut rappeler qu’à la fin du mois dernier, M. Hu Jintao avait effectué une visite officielle en Algérie. C’est le deuxième voyage de Hu Jintao en Afrique. Qu’est-ce qui attire la Chine populaire en Afrique ? Qu’attend Pékin de cette offensive diplomatique sur le continent noir ? Que veut la Chine populaire ? La République populaire de Chine est un pays émergeant. Par sa vitalité et son dynamisme, l’économie chinoise occupe aujourd’hui le quatrième rang mondial. La croissance annuelle de son PIB est à deux chiffres. Cette économie est gourmande de matières premières de toutes sortes, d’or noir surtout. Il y a aussi d’autres produits de base comme le bois dont la Chine a besoin pour son industrie. Au Nigeria où le président chinois est arrivé le 26 avril, il a été essentiellement question de pétrole, comme en Algérie il y a un mois. Avec 35 milliards de barils de réserve avérée et plus de 100 000 milliards de mètres cubes de gaz, la Fédération du Nigeria, qui compte 36 Etats est une puissance pétrolière. Voilà de quoi attirer la Chine qui voudrait diversifier ses approvisionnements en hydrocarbures. Le dirigeant chinois va négocier avec ses hôtes nigérians des contrats d’approvisionnement, des permis pour des sites d’exploration. Les échanges commerciaux entre les deux pays seront au menu des discussions. L’industrie chinoise, celle des pays asiatiques d’une manière générale inonde l’Afrique de produits manufacturés bon marché. C’est particulièrement vrai dans le domaine des cycles et des cyclomoteurs. Pour ces diverses raisons, un voyage des responsables chinois est toujours nécessaire pour se mettre à l’écoute des consommateurs africains. Il n’est pas inutile également de penser qu’au moment où il est question d’admettre un ou deux pays africains comme membres permanents au Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations Unies, cette visite se présente comme une opportunité pour le Nigeria, un séreux prétendant à ce siège de négocier la voix de Chine qui y dispose d’un droit de veto. Si la Chine est le pays le plus peuplé de la terre, le Nigeria est le pays le plus peuplé d’Afrique avec 130 millions d’habitants. Au Kenya où il a achevé sa visite sur le continent comme au Maroc où il l’avait entreprise, il a été question de coopération tous azimuts. « Quand la Chine s’éveillera » est le titre d’un livre publié par le Français Alain Peyrefitte au début des années 70. Eh bien ! la Chine s’est aujourd’hui réveillée. Elle doit être un exemple pour le Tiers-Monde. Si pendant la guerre froide, les relations entre la Chine et les pays africains s’analysaient à travers le prisme idéologique, ce n’est pas le cas maintenant. D’ici la fin de cette année, un sommet sino-africain se réunira à Pékin. l’on comprend le reproche fait aux autorités de Pékin d’accorder leurs soutiens aux régimes africains peu regardants sur le respect des droits humains. Mais ce sera trop demander à ce pays qui n’observe pas ces droits chez lui. Il faut se rappeler les massacres de Tien-Amen pour savoir le peu de cas que Pékin fait de ce droit. A l’heure qu’il est, la République populaire de Chine est le pays qui a dans ses geôles le plus grand nombre de journalistes. Il est donc facile de comprendre que ses relations soient plus cordiales avec des pays comme le Soudan, le Tchad, le Zimbabwe, le Maroc et le Kenya, etc. dont les gouvernements ne s’embarrassent pas de considérations comme le respect des droits de l’homme. Les Européens érigent aujourd’hui des barricades de toutes sortes pour empêcher l’accès de leurs pays aux Africains. Ceux-ci se tournent vers les pays asiatiques et les pays du Golfe. Munis seulement d’un passeport, ils parcourent des distances à la recherche de marchandises pour alimenter les marchés nationaux. A l’heure où les Français parlent « d’émigration subie », ce qui suppose des victimes et des coupables, la Chine reçoit chaque année un nombre plus important d’étudiants et de spécialistes venus se former dans ses universités et ses instituts. Les traces des pas du président de la République populaire de Chine sont à peine effacées que le Premier ministre japonais est arrivé en Afrique. Comme la Chine, la seconde puissance économique du monde, le Japon est venu faire son marché des matières premières et débouchés en Afrique. Saura-t-elle tirer le meilleur profit de cette cour assidue que lui fait l’Asie ? Talato Sîîd Saya
Talato Sîîd Saya
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