L’atlas Web de l’intégration régionale en Afrique de l’Ouest: "Au début des années 1950, la République populaire de Chine ambitionne de soutenir le processus de décolonisation qui s’annonce et aspire même à former un « front uni » avec les peuples africains, asiatiques et sud-américains pour lutter contre l’impérialisme.
Les enjeux géopolitiques
La conférence de Bandoeng [1] lui offre l’occasion de tisser des liens avec le continent africain, tout au moins avec les États indépendants. Les premiers contacts officiels bilatéraux sont pris aussitôt après. D’abord avec l’Égypte en 1956, puis avec quatre autres pays nouvellement indépendants : Algérie, Maroc, Soudan et Guinée.
Si jusqu’alors, la Chine et l’Union soviétique ont coopéré pour « mener l’Afrique à la révolution », leurs ambitions divergent désormais. L’URSS se lance dans la « coexistence pacifique », plaçant la paix et le désarmement au premier plan de sa stratégie extérieure. La politique de la Chine prend la voix du soutien militaire et financier de mouvements de libération [2]. A la fin des années 60, sur 41 pays africains indépendants, 19 entretiennent des relations officielles avec Pékin, contre 5 dix ans auparavant. Néanmoins, les ambitions africaines de la Chine sont limitées par sa posture systématique à l’encontre des intérêts de l’URSS et des pays occidentaux ; elle s’éloigne de pays proches des Soviétiques ou des Américains : Tunisie, Kenya, République centrafricaine, Dahomey.
Le continent africain est également le théâtre où se joue en partie la rivalité entre la République populaire de Chine et Taiwan [3]. Si en 1971, Pékin accède à l’un des cinq sièges permanents du Conseil de Sécurité de l’ONU au détriment de Taipeh, c’est en particulier grâce à l’appui des pays africains. Sur les 76 votes obtenus à l’assemblée générale, 26 émanent de ces pays. Mao Zedong dira : Si maintenant nous sommes entrés à l’ONU, c’est que les frères pauvres d’Asie et d’Afrique nous ont épaulés. Cette victoire conforte Pékin dans sa politique africaine et de nouveaux États bénéficient de l’aide chinoise au cours des années 1970 : Bénin, Maurice, Madagascar, Nigeria, Rwanda, Togo, Tunisie, Zaïre, Sénégal, Haute Volta et Cameroun. A l’orée des années 80, 44 États africains ont des relations diplomatiques avec Pékin. La décennie 80 marque le fléchissement de cet activisme du fait du réchauffement des relations Est / Ouest. Puis, de nombreux pays (Liberia, Lesotho, Guinée Bissau, Centrafrique, Niger, Burkina Faso, Gambie, Sénégal, São Tomé-et-Principe, Tchad) rétablissent leurs relations avec Taipeh au début des années 90. Toutefois, certains d’entre eux renoueront peu de temps après avec Pékin : le Lesotho en 1994, le Niger en 1996, la Centrafrique et la Guinée Bissau en 1998. Cette même année, Taipeh perd aussi son principal soutien, l’Afrique du Sud dont le jeu était de convaincre la République populaire de Chine à l’idée d’une double reconnaissance. Suite au retournement récent du Sénégal (2005) puis du Tchad (2006), seuls cinq États reconnaissent aujourd’hui l’île de Formose (Burkina Faso, Gambie, Malawi, Swaziland et São Tomé-et-Principe). L’isolement diplomatique de l’île est aujourd’hui indéniable. Le développement des relations politiques entre la Chine populaire et le continent africain est au contraire en forte croissance.
L’aide
Entre les années 1960 et le début des années 1980, la République populaire de Chine est déjà présente dans le monde de l’aide au développement (de l’ordre de 100 millions de dollars par an). Au cours de cette même période, 150 000 assistants techniques chinois sont envoyés en Afrique pour mettre en œuvre des projets dans le domaine de l’agriculture, le développement des infrastructures de transport (routes et chemin de fer [4]), la construction de bâtiments officiels (stades de football), le développement industriel (près de la moitié de l’industrialisation du Mali pendant les années 1960 a été facilitée par l’aide de la Chine). Cette aide est cependant modeste comparée à celles des autres partenaires bilatéraux : entre 1971 et 1981, la Grande-Bretagne, les Etats-Unis et la France ont déboursé respectivement 250, 800 et 1 300 millions de dollars chaque année .
Le premier forum sino-africain (mécanisme consultatif lancé à Pékin en 2000) ouvre une nouvelle ère. En l’espace de six ans, plusieurs centaines d’accords de coopération en matière d’assistance économique (coopération technique, aide projet et aide budgétaire) avec des pays africains sont approuvés ; depuis 2000, de nombreux protocoles d’accord d’annulation totale ou partielle de la dette ont été signés pour un montant de 10 milliards de dollars [5]. Le cadre de coopération s’est davantage renforcé, comme le démontre le succès du troisième forum sino-africain en novembre 2006, où 48 pays du continent étaient au rendez-vous. Devançant les autres pays asiatiques émergents (Inde, Singapour, Thaïlande, etc.) et rivalisant avec les pays de l’OCDE, la Chine s’est engagée en 2005 à octroyer 10 milliards de dollars de prêts concessionnels à l’Afrique pour la période 2006-2008. Les engagements récents du G8 au profit de l’Afrique ont-ils à voir avec l’intérêt croissant de la Chine pour ce continent ? Cette situation préfigure sans doute un nouvel équilibre au sein duquel l’Afrique sera plus en mesure de négocier avec les forces extérieures de développement.
[1] Organisée en avril 1955 sur l’île de Java (Indonésie), la conférence de Bandoeng consacre la naissance du mouvement des « non-alignés ». L’Afrique sub-saharienne, encore sous le joug colonial, y est peu présente (hormis la Côte de l’Or – ex-Ghana – le Liberia et l’Éthiopie).
[2] A l’ouverture du 8ème congrès du Parti Communiste Chinois (PCC) en 1956, Mao affirme : « We must give active support to the national independence and liberation movements in Asia, Africa, and Latin America, as well as to the peace movement and righteous struggle in all countries throughout the world » (W.A.C. Adie (1964) : Chinese Policy toward Africa.)
[3] Cette rivalité date de la guerre civile en Chine (1946) poussant les nationalistes dans leurs retranchements sur l’île de Formose. Depuis lors, la réunification de Taiwan avec la Chine continentale est devenue une question centrale pour Pékin.
[4] Parmi ces projets, la construction du chemin de fer Tam-Zam est celui qui symbolise le plus l’implication de la Chine en Afrique à cette époque. En pleine révolution culturelle, le Ministre chargé de l’aide et de la coopération chinoise signe en 1967 un engagement formel pour construire et financer la ligne reliant la Zambie aux côtes de l’Océan indien en Tanzanie. En 1970, la Zambie et la Tanzanie reçoivent un prêt sans intérêt de 400 millions de dollars et les ingénieurs chinois commencent à poser les premiers jalons du chemin de fer. Pendant cinq ans, près de 25 000 techniciens viendront aider à la construction de près de 300 ponts, 10 kilomètres de tunnels, 93 gares ferroviaires, etc.
[5] A titre de comparaison, l’initiative en faveur des Pays Pauvres Très Endettés (PPTE) a approuvé à ce jour des allègements de dette en faveur de 29 pays dont 25 africains pour un montant total de 35 milliards de dollars. En outre, le G8 a proposé en juin 2005 que trois institutions multilatérales — FMI, Association internationale de développement (IDA) de la Banque mondiale et Fonds africain de développement (FAfD) — annulent la totalité de leurs créances sur les pays qui ont atteint ou vont atteindre le point d’achèvement au titre de l’initiative PPTE, dans le but de les faire progresser vers les Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD).
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