Dans une interview accordée à Jeune Afrique, le ministre des affaires étrangères djiboutien, Mahmoud Ali Youssouf, a expliqué que les investissements chinois à Djibouti étaient primordiaux pour le développement de l’économie de son pays.
L’économie Djiboutienne est liée à celle de l’Éthiopie, mais la crise politique actuelle pourrait peser sur le développement de Djibouti. Pour Mahmoud Ali Youssouf, il existe tellement d’intérêts en commun aujourd’hui que « la moindre rupture peut avoir des conséquences très douloureuses pour Djibouti, qui s’appuie clairement sur la dynamique de développement mise en place ces dix dernières années en Éthiopie ».

D’autant plus qu’une grande partie des infrastructures construites « ont pour but de servir le marché éthiopien et le perdre serait une catastrophe pour notre économie« . Raison pour laquelle, le gouvernement djiboutien reste très vigilant sur l’évolution de la situation chez son voisin.
La Chine est une opportunité pour Djibouti et l’Éthiopie
D’ailleurs, les autorités jiboutiennes et éthiopiennes ont vu l’intérêt de travailler avec la Chine qui « a vu une opportunité à prendre. Et en effet, aujourd’hui, son argent et son savoir-faire consolide et cimente la direction prise par nos deux économies depuis le début des années 2000 ».
Opérationnelle en 2017, la base militaire construite par Beijing est un exemple de ces opportunités. « Il s’agit d’une base navale qui, selon l’accord signé entre nos deux pays en 2015, doit comprendre un quai et des baraquements pour accueillir 300 marins. Pas de troupes terrestres, ni aériennes », a expliqué le ministre.
« D’ailleurs il n’y aura pas de piste d’atterrissage. Les missions de ces forces seront les mêmes que pour les autres contingents installés à Djibouti à savoir, lutter contre la piraterie, protéger la route maritime, ainsi que les intérêts économiques et commerciaux très importants pour les Chinois, qui compte de très nombreux ressortissants dans toute la région« , a précisé ce dernier à Olivier Caslin de Jeune Afrique.
Ainsi, la Chine détient un bail de 10 ans, et paie chaque année près de 18 millions d’euros de redevance. Cependant, le gouvernement « attend surtout des retombées indirectes de cet accord, liés aux investissements réalisés sur place par les entreprises chinoises ».
Pour cela, « nous sommes en train de développer une zone industrielle de 6km² pour les recevoir, afin que Djibouti soit leur hub commercial pour toute la sous-région et en profite pour devenir un centre de transformation industriel, pourvoyeur d’emplois pour notre économie. C’est ça l’objectif de Djibouti« .
« Ils nous ont tourné le dos quand la Chine a accepté de nous suivre »
A la question de la « dépendance à la Chine et à l’Éthiopie ne risque pas d’étouffer votre pays », Mahmoud Ali Youssouf a expliqué que « les autres pays n’ont pas jugé utile de nous aider à nous développer et ont toujours accusé une fin de non-recevoir à nos ambitions de disposer des infrastructures qui devaient nous permettre de trouver notre place dans le contexte d’une économie globalisée ».
« Ils nous ont tourné le dos quand la Chine a accepté de nous suivre, malgré nos handicaps. Nous n’avons pas tendu la main au Diable mais saisi une opportunité. Nous n’avions pas d’autres alternatives. Qui peut aujourd’hui dépenser des centaines de millions de dollars pour construire un train, des ports, si ce n’est la Chine ? Qui ne risque rien n’a rien », a conclu le ministre des affaires étrangères djiboutien, Mahmoud Ali Youssouf.
D’ailleurs le 18 janvier 2016, le président djiboutien, Ismail Omar Guelleh, a signé d’importants accords économiques et commerciaux entre la Chine et Djibouti portants sur la délocalisation à Djibouti de l’activité de redistribution du commerce mondial avec la Chine ; et la mise sur pied d’une chambre de compensation au profit d’opérateurs économiques djiboutiens et le développement dans la coopération stratégique entre la Chine et Djibouti.
Autre point de cet accord, la création d’une zone franche de 48km², baptisée « Djibouti Silk Road Station » qui étendra les capacités logistiques et commerciales du pays et fera du Port de Djibouti un point d’entrée crucial en Afrique. Depuis le renforcement de ses échanges avec la Chine, Djibouti veut devenir la porte d’entrée pour l’Ethiopie, le Soudan du Sud, la Somalie et la région des Grands Lacs.
Image de Une : Ismaïl Omar Guelleh, président de Djibouti et Xi Jinping, président de la Chine