un ménage à trois avec l’Afrique
Par Sébastien Le Belzic (Pékin, Chine)
Etrange paradoxe que de voir ainsi ces deux pays se pencher ensemble sur les pandémies du continent. C’est Ebola qui a été le véritable signal de l’urgence de cette coopération. Le virus a été l’occasion pour la Chine de marquer sa solidarité avec le continent. Plus de 200 experts et médecins chinois ont été déployés dans les trois pays les plus touchés : le Liberia, la Sierra Leone et la Guinée. Pékin a débloqué une aide d’urgence de 82 millions de dollars et dans la foulée, la Chine va inaugurer cette année une première mission médicale au Mali. Les médecins chinois vont former plus de 500 agents sanitaires maliens pour la prévention du virus Ebola et d’autres épidémies. L’accord a été signé le 29 janvier à Bamako.
On est loin des médecins aux pieds nus envoyés dans les campagnes chinoises par Mao Zedong. La Chine veut démontrer cette fois sa capacité à former et venir en aide aux populations. Mais pour cela, elle a besoin de la France. La lutte contre Ebola est ainsi devenue un laboratoire de cette nouvelle coopération à trois.
« La Chine et la France sont deux pays très impliqués au Mali, explique le vice-président de Bio-Mérieux en Chine. C’est un pays idéal pour nous afin de développer cette coopération. »
Pascal Vincelot rappelle ainsi que l’entreprise française est à l’origine du laboratoire de Wuhan et qu’il s’agit là d’un centre indispensable pour prévenir et traiter des maladies venues d’Afrique.
D’autres entreprises s’inspirent de ce ménage à trois comme EDF, Areva ou Total qui travaillent déjà en Afrique avec leurs partenaires chinois. Le Mali est à ce titre la capitale de cette « Chine-France-Afrique ».
Pékin a promis en septembre dernier au président malien, Ibrahim Boubacar Keïta, plus de 10 milliards de dollars pour financer des contrats d’infrastructures, l’exploration du sous-sol malien et des programmes de santé.
Pour la France, c’est l’occasion d’affirmer son rôle d’intermédiaire en Afrique en offrant son savoir-faire, et peut-être récolter enfin quelques fruits de cette lucrative Chinafrique.
Le Monde.fr •
Il y a encore quelques années, il ne fallait pas évoquer la présence chinoise en Afrique aux diplomates du Quai d’Orsay. Sourde aux appels du pied de Pékin, Paris voulait faire cavalier seul sur le continent et surtout garder la main sur son pré carré. Mais les temps ont changé. La Chine est devenue incontournable en Afrique et les diplomates français ont fini par accepter de coopérer avec les Chinois.
Exemple lors de la récente visite en Chine du premier ministre français. « On a changé d’époque », a expliqué Manuel Valls alors que l’on inaugurait dans la ville de Wuhan, le 31 janvier dernier, le premier laboratoire P4 de Chine. Une installation unique en Asie et classée haute sécurité. Ce laboratoire est le fruit de dix longues années de tractations entre les gouvernements chinois et français. L’une de ses finalités sera le traitement des maladies infectieuses africaines.Le gagnant-gagnant
Un billard à trois bandes comme le souligne un industriel français : « Les Africains ont le marché, les Chinois ont l’argent et les Français ont les technologies. C’est gagnant-gagnant. »Etrange paradoxe que de voir ainsi ces deux pays se pencher ensemble sur les pandémies du continent. C’est Ebola qui a été le véritable signal de l’urgence de cette coopération. Le virus a été l’occasion pour la Chine de marquer sa solidarité avec le continent. Plus de 200 experts et médecins chinois ont été déployés dans les trois pays les plus touchés : le Liberia, la Sierra Leone et la Guinée. Pékin a débloqué une aide d’urgence de 82 millions de dollars et dans la foulée, la Chine va inaugurer cette année une première mission médicale au Mali. Les médecins chinois vont former plus de 500 agents sanitaires maliens pour la prévention du virus Ebola et d’autres épidémies. L’accord a été signé le 29 janvier à Bamako.
On est loin des médecins aux pieds nus envoyés dans les campagnes chinoises par Mao Zedong. La Chine veut démontrer cette fois sa capacité à former et venir en aide aux populations. Mais pour cela, elle a besoin de la France. La lutte contre Ebola est ainsi devenue un laboratoire de cette nouvelle coopération à trois.
« La Chine et la France sont deux pays très impliqués au Mali, explique le vice-président de Bio-Mérieux en Chine. C’est un pays idéal pour nous afin de développer cette coopération. »
Pascal Vincelot rappelle ainsi que l’entreprise française est à l’origine du laboratoire de Wuhan et qu’il s’agit là d’un centre indispensable pour prévenir et traiter des maladies venues d’Afrique.
La lutte contre Ebola est devenue le laboratoire d’une nouvelle forme de coopération entre l’Afrique, la Chine et la France.
« Il y a des millions de voyageurs qui transitent entre la Chine et l’Afrique, confie Pascal Vincelot. Il est donc évident qu’à un moment ou un autre les maladies présentes en Afrique vont se retrouver en Chine, ce qui inquiète beaucoup les autorités chinoises. »Mali, capitale de la « Chinafrique »
La densité du pays et la présence de 200 000 ressortissants africains dans la région de Canton, là même où se répandent chaque année de nouveaux virus en Chine, ont marqué une prise de conscience. D’un côté, la Chine contrôle plus étroitement les migrants africains et, de l’autre, elle accélère sa coopération avec des groupes français comme Pasteur, Mérieux ou le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) sur des projets sanitaires.D’autres entreprises s’inspirent de ce ménage à trois comme EDF, Areva ou Total qui travaillent déjà en Afrique avec leurs partenaires chinois. Le Mali est à ce titre la capitale de cette « Chine-France-Afrique ».
Pékin a promis en septembre dernier au président malien, Ibrahim Boubacar Keïta, plus de 10 milliards de dollars pour financer des contrats d’infrastructures, l’exploration du sous-sol malien et des programmes de santé.
Pour la France, c’est l’occasion d’affirmer son rôle d’intermédiaire en Afrique en offrant son savoir-faire, et peut-être récolter enfin quelques fruits de cette lucrative Chinafrique.
Sébastien Le Belzic est un journaliste installé à Pékin depuis 2007, où il dirige le site Chinafrica.info, un magazine sur la « Chinafrique » et des économies émergentes.