Une banque asiatique d’investissement dans les infrastructures a été lancée à Pékin. Un projet concurrent de la Banque asiatique de développement.
La Chine veut tourner la page de la domination occidentale sur la finance multilatérale. Vendredi, les représentants de 20 pays se sont retrouvés, à Pékin, pour signer l’acte de naissance d’une institution baptisée « Banque asiatique d’investissement dans les infrastructures ». Dernière-née des institutions multilatérales, cette AIIB va concurrencer la Banque mondiale, et plus encore la Banque asiatique de développement.
Selon les médias chinois, son capital de départ pourrait tourner autour de 50 milliards de dollars. Dont la moitié environ émanerait de la Chine. On compte notamment parmi les signataires l’Inde, Singapour, le Kazakhstan, le Vietnam ou le Qatar. La plupart des émergents de la région sont donc partie prenante. Les 21 pays se sont fixé pour objectif d’avoir finalisé les détails de fonctionnement de la banque d’ici à la fin 2015. Cette initiative rappelle celle prise, en juillet dernier, par les grands pays émergents de la planète baptisés BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud). Ils avaient également créé leur propre banque multilatérale, ainsi qu’un fonds de réserve, là encore dans le but avéré d’offrir une alternative à la Banque mondiale et au Fonds monétaire international.
Rivalité stratégique
De quoi irriter les pays développés. D’ailleurs, la Corée du Sud est délibérément restée en retrait du projet. De même que l’Australie. Il faut dire que Washington a lui-même milité pour la retenue vis-à-vis de cette banque. Derrière l’évidente rivalité stratégique avec la Chine, ce sont aussi les interrogations sur les modes de gouvernance de la deuxième économie mondiale qui pointent. En tant que bailleur de fonds, celle-ci s’est toujours illustrée par son principe de non-ingérence dans les affaires politiques intérieures. Principe vivement critiqué par les Occidentaux, puisque Pékin n’hésite pas à apporter son aide à des régimes non démocratiques, et alimente les mécanismes de corruption en place dans certains pays.
Jen Psaki, la porte-parole du département d’Etat américain, a donc déclaré publiquement avoir « des inquiétudes sur la nature ambiguë du projet de l’AIIB dans sa forme actuelle ». Washington, a-t-elle précisé, l’a « fait savoir publiquement ». Le Japonais qui dirige la Banque asiatique de développement, Takehiko Nakao, a tenu un discours comparable, évoquant une « idée compréhensible », tout en insistant sur la nécessité pour l’AIIB d’adhérer à des standards internationaux.
Conscient du déficit d’image dont pâtit la Chine, et bien décidé à ne pas laisser s’installer l’image d’une banque aux pratiques douteuses, le président chinois, Xi Jinping, a donc promis, juste après la signature du protocole d’accord vendredi, que les opérations de l’AIIB « devront suivre des règles et procédures multilatérales » et a promis d’étudier les « bonnes pratiques » des institutions existantes. Le multilatéralisme fait beaucoup moins peur à Pékin quand il est certain d’en être le pilier central.
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